Beignets, chouchouuuuu!

Aaaah, la terre ferme! Le sol qui ne se dérobe pas sous ses pieds, pas de cordages mal enroulés où se prendre les pattes, bref : une vraie promenade de santé! Mais ce qui réjouissait encore plus Ema, c'était la perspective d'aller faire le marché! Sur le marché de Tortuga, on pouvait trouver de tout et surtout n'importe quoi! Des produits exotiques venus du continent ou des îles aux alentours, on pouvait y dénicher des merveilles pour mitonner d'excellents petits plat pour tout l'équipage!

Oui mais voilà, avec le budget extrêmement réduit du Hell en ce moment, et avec la canonnière et la charpentière qui, elles aussi avaient réclamé une part du fond du coffre, voilà que la bourse du coq était bien maigre!

Donc, adieu jolis fruits et légumes appétissants, elle ne s'arrêta même pas sur le bel établi de viandes et poissons de la mère Astrid, et elle ne put que renifler l'étal aux épices du Mexicain! Voilà qui faisait bien mal au coeur!

Et pour couronner le tout, elle ne savait pas combien de temps elles devraient partir! Bien que Thétis lui avait assuré qu'elle pourrait trouver de quoi se ravitailler sur place, Ema préférait prévoir plutôt que d'avoir à grignoter un morceau du gaillard avant!

Enfin bref, la voilà qui arpentait les étals, à la recherche des produits les moins chers et dont la conservation serait facile et longue. Au passage, elle commença à chercher également des idées de recettes, histoire de changer un peu l'ordinaire du navire, tout en restant consistant pour que les filles puissent travailler sans baisse de tonus.

Décidément, pourquoi faire simple quand on peut faire compliquer? Heureusement qu'elle pouvait compter sur son sourire carnassier et la réputation de son capitaine pour négocier habillement les prix des produits dont elle ne pouvait se passer...

"Comment ça trois pièces pour une livre de poisson? Il n'est même pas vidé et en plus il a le regard malade!! J'suis sûre que ceux qui se balade dans le port près de la taverne ont meilleure mine! ..."
Les poings sur les hanches, la cuisinière scrutait l'étale bon marché d'un oeil expert.

"Et tes poules? Elles sont pas bien épaisse! Tu les nourris à quoi? Avec ton poisson? "
Un rire gras s'échappa de sa gorge et elle finit par conclure:

"Bon, j't'en donne trois pièces pour les trois poulardes, et trois autres pour la demi-laie, ça marche?"

Tempis pour le poisson, il faudra croiser les doigts pour qu'elles aient l'occasion de faire un peu de pêche sur la route où une fois arrivée à destination! Et puis, les poules au moins pourront leur donner des oeufs en attendant de finir sans sa marmitte !
Concentrée sur ses comptes, elle n'avait pas fait attention aux détrousseurs qui rôdaient dans le coin...

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José était las de traîner ses guenilles sur les plages rocailleuses de Tortuga. Pourtant la pêche à pied c'est plutôt son truc. Accompagné de son meilleur allié, un seau en bois de taille moyenne, il ramassait des coquillages, attrapait des crabes et autres crustacés. C'est vrai qu'un bon gros crabe au feu de bois, il y avait que ça de vrai.

Mais sans un peu de rhum, la vie est un peu moins folle pour le vieux loup de mer. Et comme il n'avait pas un rond, il savait à l'avance qu'avec son allure de vermine, personne ne lui ferait crédit... C'est donc avec l'espoir de remplir sa bourse vide qu'il arpenta la ville pour arriver au marché. Plus grand lieu de transaction, des milliers de pièces y étaient échangés entre commerçants et habitants de l'île : et c'est là qu'il trouvait des bourses clafites d'or à foison.
Néanmoins, délester les gens de ce qu'ils chérissent le plus n'est pas vraiment chose aisée et très risquée de surcroît ! La soif l'ayant emporté sur sa peur du cachot, cette vieille canaille espagnole s'adossa à un muret, juste derrière un étal d'un agriculteur local qui vendait entre autres ses légumes et ses animaux.

Au début le commerçant avait trouvé ça louche et le surveillait toujours du coin de l'œil. Mais le temps défilant ajouté aux clients qui se pressaient pour marchander ses produits, la vigilance avait diminué voir disparu. Néanmoins sa caisse avait l'air inviolable mais à vrai dire, ce n'était pas la proie du vieillard.

Il avait jeté son dévolu sur une femme ayant la trentaine , qui avait l'air plutôt exigeante et sarcastique à entendre ses réflexions visant le commerçant. Mais surtout, c'est la bourse de la jeune femme, arrondie par son précieux contenu, que "zieutait" le vieux loup de mer.

José quitta alors son petit muret. Tout en suivant la conversation, il commença à faire le tour de l'étal pour se retrouver à trois mètres derrière sa cible. C'est lorsqu'elle sera un peu chargée de marchandise qu'il commettra son menu larcin : à part si celle-ci détecte le manège qui se trame autour d'elle...

Enfin, ses emplettes étaient enfin terminées! Pas trop tôt, il y avait beaucoup trop de monde à son goût et elle détestait faire son shopping dans de si mauvaises conditions: pas beaucoup d'argent ni de temps, ni d'indication précise sur combien de temps ils leur faudraient tenir avant un prochain ravitaillement... Enfin si les finances s'amélioraient d'ici là!

La cuisinière appela les deux petites mousses, qui l'avaient accompagné pour porter les provisions, d'un ton qui ne souffrait aucune discussion. Les petites avaient sauté sur l'occasion pour sortir et aller se balader, du moins le temps qu'Ema finisse de marchander.

Une fois les demoiselles chargées comme des mules, enfin pas tant que ça si on comparait à un jour de courses un jour où les coffres n'étaient pas aussi vide!Quoi qu'il en soit, elle raccrocha sa bourse à sa ceinture et espéra que le capitaine Bell ne hurle pas en la voyant si legére!

Elle s'empara d'un cageot de poulet d'une main et d'un énorme sac de patate de l'autre et commença à prendre la direction des quais. Mais son oeil fut attiré par un vieil homme qui semblait tourner autour de l'étal dévalisé par la Coq... Etrange... Car il ne semblait pas avoir les moyens d'acheter quoi que ce soit!

Mais qu'importe, il fallait se depecher d'apporter tout ça dans la coquerie et de tout ranger avant les produits ne se détériorent...

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Pepe était à l'affût. Il observa la transaction d'argent et laissa échapper un "fichtre" à peine audible : voilà que la bourse tant convoitée perdait de sa contenance. En contre partie la malheureuse avait désormais les bras occupés et toute course poursuite éventuelle s'en suivrait d'une envolée de légumes.

Pour le vieil homme, à voir comment sa proie se comportait et remarquant les deux fillettes qui l'aidaient dans sa tâche, celle-ci devait s'occuper de la gestion d'un riche bourgeois bien gras et c'est pourquoi il serait d'autant plus motivé de détrousser un de ces notables qui lui donnait des nausées.

Alors que tout ce petit monde prenait la route du retour, le vieux loup de mer commença à les suivre mais lorsqu'il croisa le regard de celle dont il souhaitait lui piquer sa bourse, une sensation bizarre envahit le corps décharné du petit barbu : c'était comme un avant goût de cachot, comme-ci il était déjà pris alors qu'il n'avait rien fait ! Mais il ressentait ça à chaque fois qu'il prévoyait de commettre un méfait, c'était sa peur de l'emprisonnement qui prenait le dessus, rien de plus...
Heureusement ça faisait longtemps qu'il n'écoutait plus ses peurs et puis de toute façon, qu'est ce qu'il avait à perdre ? Il avait soif, il avait fin et n'avait pas un rond, alors autant se servir.

C'est donc dans cet état d'esprit que l'espagnol continua sa filature. Il attendit que le groupe de femme arrive à un carrefour bien populeux pour se lancer. Déboulant de nulle part, ce vil voleur de pepe prit un peu de vitesse et courra en direction de la bourse tant convoitée. S'en saisir, courir dans la direction opposée et à lui l'argent à facile !

Une bourse bien remplie, une main prête à la subtiliser... Scène banale sur une île peuplée de malfrats telle que Tortuga. Son issue ? Facile à deviner : le voleur sera confondu, ou enrichi. Mais se peut-il que la Fortune en décide autrement ?

La jeune femme aux bras chargés de provisions avance, confiante, quand elle se sent tout à coup délestée d'un poids à son côté. Le gredin n'est pas aussi doué qu'il l'aurait souhaité. Quand Ema se retourne, elle le voit, ses économies à la main, s'apprêtant à prendre la poudre d'escampette.

Elle n'a pas le temps de réagir : le voleur s'est élancé vers la sortie de la rue, avec tant d'enthousiasme qu'il n'a pas vu... José García López, qu'il heurte de plein fouet.

Les deux hommes chutent durement à terre, et pendant un instant, les spectateurs de la scène se demandent ce qu'il va se passer : Ema va-t-elle laisser tomber ses provisions pour récupérer son bien ? Pepe va-t-il retenir le voleur ou lui dérober son butin pour le garder pour lui-même ? Une petite foule commence à s'attrouper, animée d'une curiosité malsaine : on espère qu'il y aura de la bagarre !

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Rien ne se passe jamais comme prévu... Pepe se voyait déjà attablé à la taverne réclamant toujours plus de rhum pour étancher sa soif. Mais voilà, à vendre la peau de l'ours avant de l'avoir tué, on se retrouve floué par un jeune loup.

Avant même que le vieil espagnol enrage contre l'autre malfrat, ce dernier vient le percuter de plein fouet.

Ourf !

Retenant une "râlerie" dont seul les vieux forbans ont le secret, Pepe se relève difficilement mais repère rapidement la bourse tant convoitée. Sans trop prendre conscience qu'un attroupement était entrain de se constituer autour des deux hommes à terre, il profite de l'étourdissement de son rival pour se jeter sur la bourse qu'il convoitait depuis un petit moment déjà et prendre la poudre d'escampette.
C'est lorsqu'il commence à courir qu'il se rend compte de la masse des badauds qui se trouvaient autour de lui.

~Pourvu que personne me pourchasse...~

Pourtant, étant donné la foule qui se trouvait sur le marché, un croche-patte était vite arrivé...

Un croche-pied ou un sac de patate!

La bourse avait beau être encore plus légère qu'à l'arrivée de Ema au marché, si c'était encore possible, elle sent néanmoins le petit poids s'envoler de sa ceinture.

Le voleur avait été vif et rapide, si bien que la coq eut à peine le temps d'envoyer une volée de juron que le pillard avait déjà parcouru plusieurs mètres hors de porter des insultes de la dame.

Mais elle n'eut pas le temps de réfléchir plus longtemps qu'elle vit la chance lui sourire: il avait foncé droit dans un vieux petit bonhomme qu'elle avait vu rôder autour de l'étal un peu plus tôt. Une chance? Non finalement pas : quand elle vit sa bourse reprendre sa course sans elle une fois de plus, un nouveau juron s'échappa de sa bouche.
Si jamais elle rentrait au navire sans la bourse et bien... En fait, mieux vallait ne pas y retourner du tout! Elle n'aurait plus qu'à trouver un pigeon à son tour pour lui voler sa bourse... Mais ses talents de voleuse n'avait jamais vraiment été trés concluant... Pas assez discréte à ce qu'il parrait!
En attendant, sa fierté ne lui permettait pas de se faire distancer par ce vilain petit voleur, ça non!

"Ooh non mais c'est pas vrai!!"
Elle lâcha la caisse qu'elle tenait sous son bras gauche et s'élança tel un taureau chargeant à travers la foule de badauds, trop bête pour arrêter le voleur, mais pas assez inconscients pour rester en travers de la route d'Ema. Elle garda tout de même un sac de patate à la main, et quand elle fut à quelques mètres de lui, elle envoya son kilo de patate telle une fronde, droit sur le brigand, espérant le faire trébucher et lui tomber dessus...

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Rhum, festin, musique, rires, la tête qui tourne, voilà à quoi pensait ce petit voleur de bas étage qu'était devenu José... Lancé à pleine vitesse, Pepe se pensait désormais à l'abri et ne rêvait plus que de dépenser son menu larcin.

Malheureusement une douleur le prit subitement dans les mollets puis le mouvement naturel de ses jambes fut entravé comme si on l'avait attraper au lasso. Tel un tir au pigeon, le lancé de sac de pomme de terre avait fait mouche et le vieux pirate s'était littéralement vautré sur les pavés de la route que longeait le marché. Face contre terre, la barbe blanche de Pepe faisait désormais figure de ballet pour une route rarement nettoyé.

La douleur dans les jambes était encore vivace et le vieil homme s'était également écorché les mains en tombant... Le temps de constater qu'il ne pourrait pas se relever assez rapidement pour échapper ses poursuivants, José réfléchit à une façon de se tirer de ce mauvais pas.

~ Adieu, rhum, festin, musique, rires ~

Pepe se retourna pour se mettre sur le dos, afin d'affronter son destin. Comment allait il s'en sortir pour éviter le cachot ? Il saurait quoi faire que lorsqu'il jaugera la colère de ses poursuivants.

Quand Ema eut rejoint le second voleur, aprés s'être assurée que le premier ne bougerait pas de sa place, elle était hors d'elle. Elle avait vu sa precieuse bourse s'envoler non pas une, mais deux fois!! Elle balança un regard noir qui en disait long sur toute la foule, deconseillant n'importe quel imbecile de faire en sorte que le proverbe "jamais deux sans trois" se réalise.

Quand elle put voir le bandit à terre, elle fut un peu deçut: il avait l'air tout maigrichon, un peu vieux et son nez rouge indiqué clairement ses intentions quant au contenu de la bourse d'Ema: elle finirait dans les poches du premier tarvernier du coin de la rue. Mais son aspect plutôt miteu, voir miserable, lui ota l'envie de le faire rentrer dans une boite d'alumette. Elle se contenta de reprendre son larfeuille d'un geste bourru, accompagné d'une volée de juron.

"Non mais ça va pas bien? T'as la cafetiére félée?"

Elle était d'autant plus enervée qu'elle avait faillit transformer un de ces sacs à patates en purée avant même d'avoir été épluchées! De la nouriture gachée, alors que son budget était si limité, elle pouvait tout aussi faire demi tour et s'engager sur le Bloody Revenge, ça serait toujours moins dangereux que d'affronter sa capitaine!