Cap à l'Ouest !
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 Lizelotte Daime

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Lizelotte Daime

*
Lizelotte Daime

Féminin
Messages : 391
Localisation : Tortuga
Humeur : Ombrageuse

Carte aux trésors
Amis, ennemis, connaissances:
Baratin de haute importance:
Lizelotte Daime Vide
MessageSujet: Lizelotte Daime   Lizelotte Daime EmptyJeu 2 Sep - 23:25

Lizelotte Daime Sanstitre1zqu
Emile Lefoché, 1770

Je suis ivre.

Hé hé.

Complètement bourré, rond, plein comme un fût de rhum. Et je suis assis à la table d'une taverne qui longe le port. Notre bateau, La Belle de Printemps, mouille en ce moment à quai, allégé des marchandises qui ont été revendues. Comme d'habitude, le capitaine et son second ont partagé les bénéfices, les marins ont accueilli cet argent avec joie. Et comme d'habitude, une partie d'entre eux se sera promis de garder cet argent pour se racheter une nouvelle vie, à terre, loin des dangers de la mer. Mais bien sûr, cette même partie dépensera tout à la taverne le soir même et retournera, le lendemain, penaud sur ce navire qui leur assure une peut-être survie jusqu'au prochain port. Avec une belle gueule de bois en prime.

Je fais partie de ces gens-là. Ma précieuse réserve que je devais garder pour les temps à venir, déjà, je la vois qui s'est transformée en chopes remplies d'une bière peu couteuse. Enfin, pour l'une des chopes seulement. Les autres, elles sont déjà vides. Dommage. Je me demande où tout est parti. Je jette un coup d'oeil médusé aux autres tables. Elles aussi sont pleines de chopes vides. Les autres marins se regardent péniblement, se demandant où sont passées leurs maigres économies. Moi je souris. Car à ma table, il n'y a que moi qui ait cette odeur forte de la mer et de la sueur. Non, je ne suis pas seul. Il y a deux autres personne. Deux jolies donzelles. Propres.

" Aloooors, la suite de ton histoire, tu nous la racontes ?" demande la première avec un sourire. Elle est blonde, elle a les yeux bleus, elle a un visage de gamine, tout rond, les pommettes roses et la bouche souriante. Elle se nomme Suzette. C'est ma Suzette. C'est ma protégée. Chaque fois que nous sommes à Tortuga, je viens la voir, je lui offre un joli cadeau, je lui parle. Un jour, je lui offrirai une vie meilleure.

L'autre, je ne la connais pas. Elle est assise sur un siège, prête à s'en aller à un son. Et elle n'a pas l'air commode. Ses sourcils sont froncés, ses bras croisés, ses doigts tambourinent son bras et son pied fait pareil sur le sol. Elle est blonde aussi, les yeux bleus également, mais son visage est plus allongé. Et mécontent.

"On s'en fiche de l'histoire, Suzette, viens, on rentre !" gronde-t-elle.
" Mais nooon, je m'en fiche pas moi... on peut... on peut rester encore un peu ?" questionne la demoiselle avec un air de chien battu. L'autre soupire, fait une moue en levant les yeux au ciel et pose, sans grâce, son coude sur la table, appuyant ainsi sa tête dans la main.

"Jeeee... je te connais pas, toi. Dis, ça te dirait qu'on fasse c-co-coooonnaisance ? je demande avec peine (j'ai peut-être un peu abusé sur la boisson).
- Non, certainement pas." Répond-elle sèchement.

Mais je suis ivre. On comprend ce que l'on veut quand on est ivre.

"P-paaaaarfait ! Aloooors... Commençons par ton nom...
- Pour vous, je n'en ai pas.
- Son nom de famille, c'est Daime ! répond Suzette avec enthousiasme. Et alors, la suite de l'histoire ?
- Daime ? C'bizarre ça... Alors, Daime T'es pas un peu jeun..
- Mais qu'est-ce qu'y ma foutu un écervelé pareil ?! Tu penses que c'est comme ça que je me nomme entièrement ?
- Nooon, c'est juste son nom. C'est Elizabeth-Charlotte, renchérie Suzette.
- Zabeth-Chlotte ?
- Ouip ! Et elle a pleiiiiin de surnoms !
- Ah oui ?" la conversation commence à aller un peu trop vite pour moi, je crois. Je remue un peu la tête pour me réveiller. Ma barbe postillonne quelques goûtes de bière qui s'y étaient logées. Suzette rigole, Elizabeth-Charlotte grogne.
" Bah évidemment ! Tu penses quoi ? Qu'on va s'amuser à dire "Elizabeth-Charloooootte" à chaque fois ? Réfléchit, bougre d'idiot !  "Elizabeth-Charlooootte, veuillez débarrassez le lit, Elizabeth-Charlooootte écartez les jambes..." évidemment, que j'en ai des surnoms...
- Y'a Eliii, Eliiiiz, y'a Liz... et les dérivés, Lizzi, Lizzou -ça c'est moi, m'indique Suzette à voix basse- et Beeeth, et Chachaaaa... Et y'a le mixte entre les deux ! Y'a Lizelotte ! C'est le plus commun de tous.
- Lizotte ?
- Ouais, ouais, s'tu veux" grogne la donzelle qui, vraisemblablement, n'a pas un caractère facile. De plus, je lis aisément son envie de partir de cet endroit, même si je suis ivre. Ou de quitter ma compagnie. Mais moi, j'ai encore envie d'un peu de compagnie, alors, j'insiste. Maladroitement et toujours imbibé d'alcool.

"T'sais, Lozotte... Moi, j'suis pas un jeunet, j'ai parcouru la mer, encore et encoooore... Mais, toi, tu sais... f-franchement.T'es pas un peu jeune pour être pirate ?
- Mais quel idiot ! Où est-ce que tu as eut dans ta caboche que j'étais pirate ?
- Elle les fait pas, ma Louzounette, mais en vrai, elle a..." Pensive, Suzette compte on ne sait quoi sur ses doigts
"Laisse tomber, tu sais pas compter Suzette, l'interrompt brusquement Lizelotte
- 25 ans ! Enfin, c'est ce qu'elle dit. Ah ! Aaaaaah ! Tu vois que je sais compter !" lance joyeusement Suzette en pinçant les côtes de Lizelotte. Si c’est sensé la faire rire, c'est un échec. En tout et pour tout, la jeune femme répond d'un grognement agacé. Je regarde la scène avec amusement. C'est vrai que Suzette ne sait pas compter. Et cette Lizelotte a quelque chose d'étrange. Elle est infecte. Malpolie, de mauvaise humeur, ne semble avoir que très peu de cœur qu'elle compense par un caractère de chien. Pourtant, si cette jeune femme est aussi pénible qu'elle le montre en premier abord, pourquoi diable ne part-elle pas ? Elle ne semble pas être de celles qui ont peur de s'aventurer seule dans les rues sombres de la ville. Avec son léger accent, sans doute insulterait-elle les danger. Tiens, c'est vrai qu'elle possède un accent.

"Hey miss !" Les deux s'interrompent et m'observent. L'une avec un œil brillant, l'autre dédaigneux. "Et si t'étais pas libre comme l'air,
- Qui t'as dit que j'étais libre comme l'air ?
- tu s'rais chez qui ?
- Chez qui ?
- J'crois qu'il veut savoir de quels pays tu viens, Lizou.
- Quoi ?! s’offusqua cette dernière. Mais que ce puant le bouc aille voir ailleurs, ça ne le regarde pas !
- Notre petite dame pleine de grâce est anglaise ! me sourit ma douce Suzette. Et sans vouloir être méchante, c'est vrai que tu sens fort...
- Suzette ! Zut, tu n'es pas obligée de déballer toute ma vie à un marin rond !
- Mais..."

Ah, ça y est, elle se rebelle. Je veux calmer le jeu, ouvre la bouche et... un serveur arrive, souriant et nous demande ce qui nous ferait plaisir. Je regarde mes sous tristement. Il en reste si peu... Mais de toute façon, mes économies sont trop maigres pour faire quoi que ce soit. Et ça se trouve, je mourrai avant de revenir. Alors, autant ne pas être pingre et profiter d'une bonne soirée, non ? Je demande une nouvelle bière, Suzette ne demande rien et Lizelotte demande que je lui fiche la paix. Le serveur part en souriant. Je continue encore un peu mes investigations.

"Eeeet... Lizou...
- Appelle-moi encore une fois comme ça, je t'égorge.
- Lizelotte. Eeeet...Et tu fais quoi de ta vie ?
- L'alcool ne rend pas sourd, mais il rend décidément stupide. Ça ne te regarde pas !
- Elle est..." Suzette parle de manière enthousiaste, mais interrompt  devant le terrible regard noir de Lizelotte. Je la regarde, approche en souriant et dit, enjôleur :
"Je finirais mon histoire, si tu me dis tout.
- C'est vrai ? Elle est comme moi alors ! On travaille ensemble !
- C'est une prostituée ?
- Fille de joie, catin, putain, choisis ce que tu veux." Gronde-t-elle.

C'est une surprise. Elle parait si fière et se tient d'une telle façon... je ne le crois que difficilement. Mais elle ne le dit pas avec honte. à la voir ainsi, on croirait que n'importe quel métier, elle le dira de la même façon : avec agressivité et... Non, juste avec agressivité en fait. Mais sans honte. C'est surprenant. J'en perds encore plus mon vocabulaire. D'autant plus que ma dernière chope est arrivée et, sous le choc, je la bois quasiment cul sec.

"Et-et-et-et-Et pirate, c'est une vocation ou t'as plus un rond ?
- Pirate ?! Je ressemble à une pirate ?!
- à une lionne, plutôt, Lizou !" rigole Suzette.
Lizotte s'est levée, hors d'elle et a fait claquer ses mains sur la table. Même si sa voix porte, pour dire vrai, personne ne fait vraiment attention. Le brouhaha constant, les discutions des matelots couvrent bien le bruit de mes chopes qui grondent sur la table. Elle reste blanche. Pas de joues rouges, de veines qui se gonflent et battent au rythme de sa colère. De plus, presque rapidement, elle s'assoie, croisant de nouveau les bras sur sa poitrine et finit par grommeler.
"Je suis pas pirates. Mais... si je devenais pirate, ça serait pour... peut-être changer de vie. Ou alors... Pour aider quelqu'un. Mais il me faudrait une bonne raison.
- C'est vachement beau ce que tu dis Lizou.
- Lâche moi."



Lizelotte Daime Sanstitre2dbg
Suzette, 1768.

Il y a un homme qui me regarde. Je suis assise, avec les autres filles, dans le petit salon de notre maison. La maison de Berthe, elle est connue, la maison. Quelques filles de joie y vont, d'autres sont dehors. On est bien entretenues ici. Car ici, on vit. Oh, on travaille, on vend notre corps pour offrir du plaisir à quelque marin, des passants, des hommes. On déniaise aussi des jeunes garçons, mais je ne m'occupe pas de ceux là, parait que je suis trop bizarre pour ça. Trop naïve. Les hommes avec "de la bouteille" me préfère, qu'on dit. Pour moi, ça revient au même : j'ouvre mes jambes et je fais la même chose chaque soir. Mais ici, pendant notre semaine indisposée, on fait le ménage, on fait la cuisine, on prépare l'eau chaude pour les bains des autres et on est payée aussi. Mais en plus, on a de la nourriture chaude tous les jours. On a un lit où dormir. Et on est propre. Je suis toujours indisposée avec Lizelotte. Ma Lizou. ça me fait plaisir, je l'aime beaucoup. C'est vrai qu'elle crie beaucoup, c'est vrai qu'elle semble méchante.

Mais je sais que c'est faux. Elle ne le chasse même pas... je ne sais pas comment il s'appelle. Il vient souvent. Je crois qu'ils ne font rien. Elle le laisse venir. Il a l'air gentil. Et Lizou, elle fait pleins de trucs ici. Elle travaille, comme les autres filles. Mais en plus, elle fait bien la cuisine. Et en plus, elle vient nous défendre, quand parfois il y a un problème. Et parfois, quand on lui demande conseil, elle nous en donne. Je crois que celui que je retiens le plus, ça doit être "pense à autre chose.". Alors, oui, elle grogne, elle a l'air de mauvaise humeur, elle est colérique, elle n'est pas polie, pas gentille... Mais dans le fond...

L'autre homme, s'avance, là. Il a discuté avec Berthe. Elle m'a regardé, a acquiescé. Il vient. Il me prend le bras, me traine jusqu'à ma chambre. Il me pose sur le lit. Je m'y assoie, docile. Il me regarde. Il approche le visage. Il sent l'alcool. Il a un sourire idiot.

"Alors, ma mignonne...T'es pas du genre à tenir tête au capitaine, au moins ?"

Je ne me sens pas bien. Il me fait un peu peur. J'aime bien les pirates, ils ont toujours des histoires à raconter. Mais lui ne me plaît pas. Alors qu'il écarte mes cheveux blond de son doigts calleux, je sens un frisson descendre le long de mon dos. Je sens une première panique me prendre. Je pense à autre chose.

" Li... Lizou, elle est...
- Lizou ?
- C'est une lionne ! (je rigole nerveusement) Si elle était sur un navire pirate... Je ne sais pas, peut-être qu'elle tiendrait tête au capitaine. Mais peut-être pas, c'est étrange... Lizelotte, elle est toujours sèche, peu avenante, le visage fermé, calme... mais elle est surtout très colérique. Elle grogne, elle ne semble pas très patiente, ni très polie, ni très aimable, elle n'aime souvent rien et cherche à ne pas se faire aimer. Selon elle, ce qu'il faut pour vaincre, ce n'est pas de la patience, de la diplomatie, comme on dit tout le temps. Ce qu'il faut, c'est de la hargne. Et elle en a. Et elle n'a pas la langue dans sa poche du tout. Elle n'est souvent ni subtile, ni diplomate et quand elle veut dire quelque chose, elle le dit franchement sans prendre de gants. Elle pourra même être méchante, en fait...
- De qui tu parles, là ?
- Et elle... elle... Elle a les pieds sur terre. C'est qu'elle est intelligente, Lizelotte, elle parle anglais et français ! Elle parlait juste anglais en arrivant, mais ça fait des années qu'elle est là maintenant. Alors, elle a appris le français. Mais elle sait pas lire. elle sait compter, mais elle sait pas écrire. Elle a pas d'éducation, en fait. Elle apprend à la dure. On dit qu'elle est souvent cynique. Ou ironique. Ou sarcsastique. Sarcastique. Ou je sais pas quoi. Je sais pas ce que ça veut dire, mais on lui dit souvent. Je vois juste qu'elle répond facilement, qu'elle cherche parfois les ennuis en provoquant à tord et à travers... Mais elle sait généralement où s'arrêter et quand partir. C'est une forte tête. Et tout ce qu'on peut lui dire, elle n'en aura souvent pas grand-chose à faire. Elle "enverra ses cul d'jatte aller voir ailleurs", qu'elle dit souvent.
- Moi, je la materais... me dit l'homme avec un sourire gras.
- Lizou, elle est pas bête. Elle sait quand s'arrêter pour ne pas avoir trop d'ennuis, je crois. Et elle sait se défendre, mieux que ce qu'on croit. Et elle vise mieux que personne. Q-quand on a un soucis, elle prend un vase et l'envoie à côté de la personne à soucis. Elle appelle ça un vase à sommation. Si la personne continue, elle recommence, mais vise la tête. Qu'importe ce qu'elle a en face d'elle. Elle n'a que faire de la hiérarchie, se fiche que la personne soit homme ou femme... mais elle sait quoi faire pour rester à sa place.
- C'est faux cul."

L'homme rigole. Il commence à embrasser ma nuque, la naissance de mes seins. Il me retire la robe. Je me laisse faire, docile. C'est mon travail, tout est normal. Tout va bien. Et Lizelotte, elle... Non, elle est pas faux cul. Elle gère juste la situation comme elle peut pour survivre, sans se faire écraser les pieds. Ah, il me lèche... Mais malgré sa réputation de grande gueule, elle parvient à rester à la Maison de Berthe. Elle sait serrer la mâchoire quand il faut. Sauf quand elle agit sur le coup de l'impulsivité. C'la arrive, parfois. Et Lizou, elle est courageuse, voire téméraire et n'exprime jamais ses doutes. Elle est forte, ma Louzou. Elle ne se plaint pas. Elle ne s'apitoie jamais sur son sort. Elle est comme... comme un roc dans la mer. Les vagues passent, l'ensevelissent, elle reste droite et subit, sans bouger et sans rien dire. Elle a quelque chose de fier. Et c'est sans doute pour ça qu'elle est si rude à l'extérieur. Peut-être qu'à l'intérieur, par contre, Lizelotte, c'est quelque chose de tout doux. Mais je pense pas qu'elle sache exprimer ce côté tout doux.

Elle est aussi maladroite, certaine fois. Elle peut se cogner souvent. Mais elle reste fière et fait celle qui n'a rien vu. Et... Et elle est pas à l'aise avec les bêtes. Toute sorte de bête. Les petits lui font peur, mais elle tente de se maîtriser, et les grosses bêtes... ne la mettent pas à l'aise. On a l'impression qu'elles la regardent... C'est-c'est-c'est étrange à v-voir. Elle... Elle a aussi tendance à "interpréter mal" ce qu'on lui dit... pour énerver... Si on lui dit qu'elle est bien coiffée aujourd'hui, elle rétorquera "alors, c'était pas le cas hier ?". Elle s'amuse à énerver ou rendre confuse certaine personne. Ah.

Aaah, il approche. Je sais comment elle fait, pour rester impassible, malgré ça. Il se déculotte. Je respire. Je veux être comme ma Lizelotte. Alors, je fais comme elle. Je ferme les yeux et m'offre à l'homme.

Il me prend.

Je pense à autre chose.

Philippe Amboise, 1763

Je n'ai jamais pensé que vivre ici était une aubaine. La plupart des habitants ne sont que de passage, posés par un bateau et ramenés par le même. Je déteste la mer. J'ai vite le mal de mer d'ailleurs. Et je crois que je n'aime pas ce qu'il en sort. Le poisson, l'odeur, les marins. Ils se foutent un peu des conséquences de tout. Quand ils arrivent, ils n'ont que l'allégresse de la terre, les pièces sonnantes et trébuchantes qui chantent sur les comptoirs de tavernes en se transformant en alcool. L’alcool se transforme en agitation, en dispute et finit en combat. Parfois sanglants, parfois mortel. Quels bandes d'idiots. Et il y a des dommages, de la casse. Alors, ouais, ouais, il en existe des mieux, peut-être. Des gens sans doute bien, même. Mais de ceux là, je n'en croise pas. Et je crois que je préfère rester avec ma vision dure de la réalité, plutôt que de chercher que j'ai tort et l'enjoliver. Je suis désabusé, je crois, à force de vivre dans cette réalité. Les gens disent cette ville vivante, remuante, dansante et chaude comme une femme... à mon sens, elle engloutit seulement ceux qui entrent dedans, elle transforme les gens en autre chose, pour qu'ils puissent survivre. Nous sommes chez des pirates, les simplets ne vont pas très loin ici. Il y a une loi du plus fort ici.

Pourquoi je pense à tout ça moi...

Peut-être parce qu'aujourd'hui, la mer a recraché sur moi la chose que je n'aurais jamais cru voir par ici. La mer et cette ville lui ont fait un peu de mal, déjà, elle rayonne moins. Elle engloutit avec faim l'assiette de potage que je lui ai proposée. Elle boit sans réflexion l'eau sale que je lui ai donnée. Ses vêtements sont en mauvais état. Je soupçonne même ce châle grossier d'être l'un de ses anciens jupons. Je l'ai trouvée dans la rue, en boule serrant les dents et se courbant pour oublier la faim et le froid. Je lui ai proposé de venir et de lui donner à manger. Elle m'a regardé avec méfiance. Elle ne parle pas français, ou pas très bien en tout cas. C'est peut-être l'avantage d'être marchand ici. On apprend vite à devenir multilingue. J'ai refait ma proposition, mais en anglais. Finalement, elle m'a suivi chez moi.

Elle m'a dit s'appeler Elizabeth-Charlotte Langevin.

Pourquoi pas.

Puis elle m'a dit que non, plus de Langevin. Ce salopard l'a abandonnée. Elle a mordu sa bague, l'a tirée en usant de sa salive pour mieux faire glisser. Elle l'a craché par terre en répétant "plus Langevin." Et elle s'est remise à profiter de la chaleur du potage. J'ai demandé ce qu'il s'était passé. Elle m'a dit, sommairement, avoir été mariée, de force, à un homme. Ce dernier a donné une belle somme à ses parents pour l'acheter. Ces derniers ont pensé que c'était un bon parti. Alors voilà, c'en était fini de ses rêves. Pour une poignée d'argent, elle se retrouvait à porter une robe hors de prix pour voyager sur un bateau, pour accompagner son nouveau mari. Elle ne l'aimait pas. Lui aimait son apparence. Et ont commencé les disputes. Il voulait qu'elle obéisse, elle refusait son autorité. Alors, sur un coup de tête, il la laissée ici, dans cette ville, sans rien. Et elle, sur un coup de tête, s'est enfoncée ici. Il a dit qu'il reviendrait la chercher. Elle assure qu'elle ne repartira pas.

" Et tu as quoi d'incroyable pour qu'il veuille de toi juste sur un coup d’œil ?"

Elle me jette un regard noir et continue à manger, comme si je n'avais rien dit. Quelle garce. Je la nourris quand même !

"Hého, je te parle. On voit rien avec tes jupons en loque. T'es plutôt gringalet ou baraquée ?
- Vous avez des yeux, non ?"

Elle retire enfin les maigres gilets qu'elle porte, son châle de fortune et je peux la voir. Car oui, madame, j'ai des yeux. Et ce que je vois a une bonne couche de crasse. Je ne sais pas depuis combien de temps elle est dehors, mais la fleur s'est encrassée. C'est triste.

La fleur, déjà, elle est de taille moyenne et elle est toute fine, longiligne, presque trop fine. Pff, ça commence mal, je les préfère rondes. Après l'avoir vue marcher et tomber, je peux dire que ses chevilles sont maigres. Et ses jambes, je ne les ai qu’entraperçues, elles m'ont l'air droites, sans trop de formes. Pas de mollet marqués. On a l'impression qu'elles se briseraient facilement. Ses cuisses sont déjà un peu plus rondes, mais ses hanches restent un peu fines. Je ne pense pas qu'elle fasse une bonne mère. L'enfant casserait le bassin, sans doute. Ah, qu'est-ce que j'en sais, moi. Elle a l'air d'avoir la peau sur les os, à ce niveau là.

Mais peut-être que ça serait dommage qu'elle ait un gosse. Sa taille est incroyablement bien marquée. J'aimerais croire que c'est à cause du corset, mais visiblement, la miss n'en porte pas habituellement. Celui qu'elle a, on voit qu'elle l'a grossièrement défait et rattaché, pour respirer sans se dénuder. Mais même sans corset, sa taille est fine. Sa poitrine grossit et rétrécit à mesure qu'elle respire. Elle a des seins, mais pas trop non plus. Ils sont ronds et ici, comprimés légèrement par ses vêtements. Ses épaules sont frêles et sèches. Ses bras sont longs et délicats, mais présentent tout de même une habitude à faire des tâches physiques. Je me demande quelle vie elle menait avant.

Ses mains ont de longs doigts arachnéens, mais on voit de la crasses sous ses ongles. Et l'intérieur est abimé par les tâches quotidiennes.

Son cou est fin et mène sur une tête au visage ovale. Ses lèvres sont d'une douce couleur saumonée, son nez est petit et pointu, ses yeux bleus sont très clairs. Elle a des pommettes roses, peu marquées. Ses traits sont très doux, en fait. Ouais, ça contraste avec son caractère de chien. Ses sourcils sont blonds, peu visibles, mais visiblement souvent froncés. Son front est rond et finit sous une masse de cheveux fins et blonds, clairs, presque cendrés. Ils lui arrivent en bas du dos. Et enfin, sa peau est pâle, incroyablement pâle. Sur un pont, elle grillerait, sans doute.

D'accord, sans cette couche de crasse, cet air bougon, elle a quelque chose d'une jolie poupée insalissable, presque angélique. N'empêche que je préfère les rondes.

Elle me regarde depuis un moment. Elle a fini son potage et l'eau que je lui avais proposé. Elle a l'air moins malade que tout à l'heure. C'est pas plus mal. Elle me dit "et maintenant ?". Maintenant, je lui dis que de la nourriture, ça se paye. Elle me rétorque qu'elle n'a pas d'argent et qu'elle me l'a bien dit tout à l'heure. Je m'approche d'elle, lui passe le doigt sur l'arrête douce de son visage.

Je lui dis qu'il n'y a pas que l'argent pour payer quelque chose. Passé la stupeur, elle comprend.

Eric Langevin, 1762.

Je m'agite dans ma couchette depuis un moment. J'ai peine à dormir. C'est régulier, quand j'embarque juste. Je souffre de mal de terre en arrivant et de mal de mer en repartant. Oh, cela va passer, je le sais. Mais en attendant, j'ai grand mal à dormir. Nous avons embarqué d'Angleterre, nous allons voguer un bon moment. Nous ferons escale à Tortuga. Ce qui me déplaît au plus haut point, on dit que cette île est infestée de pirates. Et malheureusement pour moi, j'ai tant entendu cette histoire que je ne pense pas que ce soit un simple racontar de femmes de marins tentant de tromper leurs ennuis. Que vont faire des pirates s'ils croisent un honnête marchant comme moi ?

Peut-être pas si honnête. Peut-être est-ce que je transporte quelques marchandises qu'on ne soupçonnerait pas. Et que je la vends où il se doit. Le capitaine de mon navire est un homme qui sait ce qu'il fait. Il sait parlementer et naviguer. J'ai bien fait d'engager un homme tel que lui. C'est lui qui m'a conseillé de dissimuler quelques marchandises moins légales sous mon flot de légalités. Il avait raison. Ma fortune n'a fait que progresser depuis et la sienne aussi. Mais j'ai peur que Tortuga soit un poisson trop gros pour moi. Mais la richesses miroitée est tentante. L'argent achète le bonheur. Maintenant, je peux enfin assouvir tous mes désirs. Un simple claquement de doigts m'offre toutes les possibilités. Comme ma dernière acquisition. Elle dort sur ma couchette. Elle a un air de poupée de porcelaine. Sa peau est douce et elle sent bon. C'est ce que j'ai vu, la première fois que je l'ai croisée. Je l'ai voulue.

Et elle est à moi.

Ses parents n'ont guère été compliqués à faire céder. Je m'en étais réjoui. Je pensais avoir trouvé une femme douce et obéissante, fragile petit être que j'aurais à protéger. Je pensais l'impressionner sur le navire, à prendre soin de cette chose terrestre, certainement pas maritime. La réalité a été tout autre. Elizabeth-Charlotte s'est incroyablement bien faite à la vie rude du navire. Pire, j'ai été malade, elle s'est très bien portée. Elle ne s'est guère souciée de mon état. La vérité, c’est que nous ne nous entendons pas. Elle refuse mon autorité. Quelle petite sotte. Je lui hurle dessus, elle a le toupet de répondre. Même devant les marins qui rient, après, dans mon dos. Je lui jouerai un jour un mauvais tour, pour lui apprendre le respect. Petite garce.

Là, elle dort. Profondément. Cela m'horripile. Comment peut-elle si bien dormir alors que moi non ? Son premier soucis, ça devrait être mon confort. Elle devrait être à mon chevet, à s'inquiéter de mon sort. J'ai décidément fait une mauvaise affaire.

Je la secoue, elle grogne. Je la secoue encore plus, en l'appelant. Elle finit par grommeler.

"Quoi, que veux-tu ?
- époux, mon tendre époux, tu devrais ajouter.
- Bien sûr, répondit-elle avec ironie.
- Je ne dors pas.
- Je le vois bien. Vous noterez, mon "bon époux", qu'à présent, moi non plus.
- Suffit les effronteries. Je n'ai pas envie de me disputer maintenant.
- Pareillement, j'ai envie de dormir."

Elle se recouche. Je m'énerve encore plus. Je lui secoue l'épaule de nouveau.

" Quoi ? Demande-t-elle sèchement.
- Raconte-moi une histoire.
- Pardon ?!
- Allons, on se connait à peine, Tu n'aurais pas une histoire à me raconter ? Pour faire plus amples connaissances, entre être mariés.
- Mais pas maintenant ! J'ai sommeil, je dors !
- Elizabeth-Charlotte ! C'est un ordre !
- Et c'est hors de question !
- Mais diable ! Les paysannes n'apprennent-elles pas le respect envers les hommes ? "

Elle me fusille du regard et se lève, enfile un châle et se dirige vers la porte de la cabine.

"Elizabeth-Charlotte ! Où vas-tu ?!
- Sur le pont ! Quitte à ne pas dormir, les marins seront sans doute d'une meilleure compagnie que vous, mon "époux" !"

Et sur ses mots, elle sort et claque la porte. J'espère qu'il lui arrivera malheur, à cette petite sotte, qu'enfin elle se soumette un peu à moi. Je commence à penser que ça serait la seule solution. Cette ingrate, ne voit-elle pas tout le bien que je lui fais ? Je l'honore, l'habille, la nourrit... elle me devrait loyauté et obéissance ! Respect ! Après tout, elle vivra oisivement, protégée de mon aile bienfaitrice ! Grâce à mon argent ! Mais non, elle n'éprouve pas la moindre gratitude envers ma personne. C'est révoltant. Peut-être que quelques jours sur Tortuga lui réapprendrait sa place et son rang.


Charles Blondies, 1756.
"COURS LIZ !!!"

Elle est p'tite, elle va pas le faire. En plus, c'est une fille. Les filles, ça court moins vite que les garçons. Chaque fois qu'on joue à courir, elle et Max, Bart, Allen et moi, elle est toujours dernière. Mais on l'aime bien, notre p'tite sœur On s'amuse avec elle, elle est rigolote et vivante. Et on trouve ça injuste que Maman ait pas voulu qu'elle aille à la ville avec nous. Ouais, Eliz, elle a pas à y aller. C'est dangereux, elle est jeune et c'est une fille, qu'ils disent. Mais ! Mais on la protègera nous ! Et elle a le droit de ne pas passer sa vie dans l'auberge familiale. Alors, en secret, on lui a dit qu'on partait à l'aube. Et tout discrètement, elle s'est lavée, habillée. On a partagé nos petits déjeuners. Quatre portions de nourriture partagées en cinq, on verra pas la différence. En plus, c’est une petite fille, elle ne mange pas beaucoup. Elle est toute maigrelette, notre Eliz. Au début, il parait que Papa et Maman n'avaient pas beaucoup d'espoir sur sa... chance de survie, qu'ils disaient, je crois. Mais elle a survécu et elle avance, avec nous. Plus exactement, là, elle court de toute la force de ses petites jambes.

Maman et Papa travaillent tous les deux dans une auberge, située entre deux villes. On vit loin de tout, très simplement, mais on est tous heureux de vivre comme ça. Nos parents nous aiment très forts, c’est agréable. Et on aide beaucoup. On débarrasse dans l'auberge, on lave la vaisselle et Liz, elle aide à faire à manger. On s'occupe aussi des chevaux et des bêtes. Pas Liz. Elle, elle est pas à l'aise avec les animaux. On sait pas pourquoi. Quand elle voit une araignée, ou toute sorte de petite bête, c'est la seule fois où on la voit hurler. Tomber, se cogner, elle dit rien. Mais les petites bêtes, elle aime pas ça. Et les grosses... les grosses la regardent, étrangement. C'est comme si elle avait quelque chose de bizarre et que ça attirait le regard des bestioles. Même à moi, ça ferait peur. Alors, elle reste en cuisine, avec Maman. Elle apprend plein de trucs. Papa dit qu'elle fera une bonne épouse plus tard. Eliz ? Une épouse ? NOTRE Eliz ? Beuaaaaaah ! Pourquoi pas maman, tant qu'ils y sont ! Les adultes, ils ont décidément de drôles d'idées.

En fait, j'en sais rien, et j'veux pas savoir. Pour le moment, tout ce que je sais, c'est que papa va en ville pour chercher des provisions. Que les fils sont invités à y aller et que Elizabeth-Charlotte non. Et que c'est pas juste. Qu'elle nous a vus partir et qu'elle court derrière la charrette, avec nous dessus. Elle est rouge, ses cheveux volent au vent, on voit qu'elle y met de la volonté. Mais la charrette est en train de la distancer. J'ai de la peine pour elle. Elle voulait venir, elle aussi. Elizabeth-Charlotte ne pleure presque jamais. Du moins, pour une fille, c’est très raisonnable. Mais là, je crois voir qu'elle a des larmes aux yeux.

Bart se tourne et regarde notre père en lançant un déchirant "Papa !". Bart est fort pour jouer la comédie et contrôler mon père. Ou alors, celui-ci se laisse faire, car aussitôt, il rigole et fait ralentir un peu la charrette. Elizabeth-Charlotte court encore plus vite, elle saute... Et Quatre paires de mains se tendent pour l'attraper et la mettre dans la charrette, avec nous. Elle est hors d'haleine et toute rouge. On rigole en lui frottant le dos. Papa laisse un peu de temps à la p'tite pour pouvoir articuler autre chose qu'un simple râle.

"Alors, maman a été d'accord pour que tu viennes finalement, Elizabeth-Charlotte ?
- Heu, heuuuu, maman, elle... elle..."

Elizabeth-Charlotte rougit.

"Visiblement, maman n'est ni d'accord ni au courant. Reprend-il avec un ton léger.
- N-non... répond notre petite sœur avec une petite voix.
- Et c'est pas juste ! Pourquoi elle pourrait pas voir la ville, hein ? je demande avec force.
- Ouaiiis, ajoute Max, Liz aussi elle a le droit de voir la grande ville !
- Déjà qu'elle veut travailler dans une auberge toute sa vie, elle peut sortir en étant jeune ! continue Allen
- Ouais ! C'est quand elle est jeune qu'il faut la travailler au corps !"

Papa se retourne et me regarde, les yeux rond de surprise. C'est à mon tour de rougir et de me justifier

" C'est un des voyageurs, il a dit ça. Je... j'ai cru que ça voulait dire..."

Papa rigole et me gratte le dessus de la tête d'une main affectueuse tandis que je me jure de comprendre ce que je venais de dire. Mais coupant cours, l'adulte du groupe demande:

"C'est vrai ce que disent tes frères ? Tu veux t'occuper de l'auberge ?
- Ouaip ! Répond avec enthousiaste Eliz. Quand j's'rais grande, j'aurais une auberge, tout comme celle de maman ! Et j'aurais un mari comme papa ! Et je ferais la cuisine ! Et j'aurais des enfants comme maman ! Et, et et !!
- C'est ambitieux ça ma chérie. Tu crois que t'y arriveras ?
- Ouip !
- C'est bien ! rigole notre père. J'espère que tu y arriveras."

Nous parlons encore des projets d'avenir de chacun. On a un comédiens, un boulanger, un pirate ou alors médecin, ou instituteur. Tout ça fait rire notre père. Des rêves pleins la tête, nous oublions que nous ne savons pas lire, ni écrire. Nous oublions qu'on finira sans doute tous à cultiver des champs. Moi, j'en sais rien. Je crois que je verrais plus tard. J'ai encore un peu de temps avant de penser à tout ça. Je suis content qu'on ait emmené notre petite sœur Maman a dû être inquiète, puis comprendre où était sa fille. Si ça avait été un tel problème, papa n'aurait pas permis qu'elle vienne. Peut-être l'ont-il juste laissée venir pour mieux la punir après. Il savent qu'elle n'obéit pas facilement. Eliz, c'est une fille, oui, mais pleine de vie et amusante. Alors, Papa et Maman, ils ont compris qu'il y a une part de tout. Il y a un moment où il ne faut pas empêcher une petite fille de découvrir pour la première fois la ville et un temps où il faut lui apprendre à obéir. Mais chaque chose en son temps. Pour le moment, c'est juste l'heure de la découverte.

Nos rêves, ça sera Elizabeth-Charlotte à les perdre la première fois. Cette ville... Je croyais que ça serait bien de l'emmener. Qu'elle s'amuserait. Oh, ça a été le cas, un premier temps. Puis on l'a remmenée. Elle était bonne en calcul, on ne sait pas trop comment. Mais elle négociait et montrait de la hargne dans ce qu'elle disait. Les vendeurs, amusés laissaient faire. La vie était douce est drôle. Puis elle a bousculé un jour quelqu'un. Un homme. Celui qui tua les rêves de notre Lizelotte, il s’appelle Eric Langevin. Et c'est dans cette ville qu'elle le rencontra. Peut-être que pour une fois, il aurait mieux valu qu'elle ne vienne pas dans la ville.


Erica Blondies, 1745.

Dieu, sainte mère ! Que ça fait mal ! Je mords un peu plus le torchon qu'on a placé entre mes dents et me promets que c’est la dernière, oui la dernière fois que je fais un enfant. C'est mon cinquième. Du moins, le cinquième qui voit le jour. Je me demande s'il sera mort-né, je me demande s'il vivra plus que deux jours. Je me demande si c’est un garçon ou si c'est une fille.

Mais je jure que c'est le dernier que je fais. Oh, oui, d'accord, peut-être ne devrais-je pas jurer. Je ne tiendrais pas cette promesse. J'aime mon mari. Je l'adore. Il ne devrait pas être là, pour la naissance de son enfant. Il devrait s'occuper de l'auberge. Mais quand le travail a commencé, dès qu'on l'a appelé, il a tout laissé et est venu, a accourut près de moi. Il prend un chiffon et m’essuie mon visage plein de sueurs. Il serre ma main et ses dents chaque fois que je pousse un hurlement.

Désolée chéri, je te sourirai bien pour te montrer mon amour, mais j'ai d'autres soucis, vois-tu.

Que ça fait mal, bon Dieu ! Pardon, je ne devrais pas jurer, sinon, il m'arrivera malheur. Mais que ça fait mal !! Mais je ne peux pas jurer que ça sera mon dernier pour autant, je le sais. Car le soir, chaque fois que mon mari voudra de moi, j'accepterais. Alors, il y aura toujours un risque que je tombe enceinte un jour ou l'autre.

Mais si celui-ci pouvait se hâter de sortir, je lui en serais très reconnaissante.

J'espère que ça sera "celle là" en fait. J'ai déjà quatre beaux garçons en pleine santé. J'aimerais une fille. Je me demande si à force de serrer le torchon dans ma bouche, mes gencives ne saignent pas un peu. Mais qu'est-ce que j'ai mal. Mon mari semble paniqué. Je me sens de plus en plus mal, également. Il m'encourage, me parle. Je n'entends rien, mes oreilles bourdonnent et ma vue se trouble. Je fournis un dernier effort, m'excusant auprès de mon enfant, car celui là, ça sera le dernier.

Le médecin venu m'assister sourit enfin et, tremblant sous l'effort qu'il veut nous faire croire avoir fournit (menteur ! C'est MOI qui accouche, que je sache ! ) Il soulève l'enfant qui se met alors à pleurer à plein poumons.

"C... c'est une fille !"

Je me sens atrocement faible. J'ai atrocement mal également. Mais de voir ce petit être s'agiter et pleurer... Cette fille, enfin, vivre... j'en oublie tout. Je tends les bras, le médecin coupe le cordon et me pose l'enfant sur le ventre. Je lui caresse doucement les cheveux. Mon mari aussi est ému. Il est pâle comme un linge, comme à chaque fois que j'ai un enfant et sanglote presque d'émotions.

"Alors, comment allez-vous l'appeler ? Nous demande le médecin.
- Elizabeth ! répond rapidement mon mari.
- Charlotte, je dis à mon tour d'une petite voix."

Nous échangeons un regard, un sourcils haussé. Ah, oui, on ne s'était peut-être pas mit d'accord la-dessus. Et je ne suis pas en position de beaucoup pouvoir parlementer. C'est finalement le médecin qui coupe l'échange entre mon mari et moi et dit :

"Elizabeth-Charlotte ? C'est original."

Et c'est un long prénom, ça. Mais mon mari hausse les épaules, semblant accepter le compromit. Je me tourne vers l'enfant, qui pleure toujours.

"Elizabeth-Charlotte... "je murmure en lui caressant la tête d'un doigt. J'accepte aussi ce compromis. Mon mari m'enlace tant bien que mal les épaules en m'embrassant le front. Le malaise passe petit à petit, je souris à ma petite fille.

"Ne pleure pas, Lizelotte... Ce n'est que le début de ton aventure."

Lizelotte Daime Sanstitre3su
    Ton prénom/pseudo : Alors, moi c'est Flore. Sur le net, on me trouve souvent sous le pseudo d'Ecundemi
    Ton âge : 23 ans. Ouaip, pour l'instant, je suis la plus âgée ! Mais plus pour très longtemps... Ah et je suis sans doute la moins bonne en orthographe. J'fais beaucoup d'efforts, mais c'est pas toujours récompensé, donc, désolée...
    Comment as-tu découvert le forum ? On me l'a montré, j'ai vite aimé ! Alors, la personne n'est pas encore inscrite, mais je le dénoncerais très vite.
    Ta première impression : Très bonne ! Y'a que des choses que j'aime : pas d'avatar photo, une qualité qui est là sans prise de tête (pas de 500 mots exigés minimum) et le design est très plaisant et sobre. Et le forum est jeune et actif (et les admins n'en ont pas encore marre), que demander de plus ?
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Dernière édition par Lizelotte Daime le Sam 4 Sep - 10:19, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Lizelotte Daime   Lizelotte Daime EmptyVen 3 Sep - 22:48

Tout d'abord, bonjour et bienvenue parmi nous \ô/
Alors je tenais tout d'abord à te féliciter pour cette fiche, qui est certes longue, mais fut fort agréable à lire : tu as un style très vivant, c'est un plaisir ! J'aurais cependant quelques points à revoir avec toi. Commençons par les questions de fond :

Déjà, nous avons déjà une Elizabeth. Or, si ce prénom était certes très courant, nous préférons éviter d'avoir des pseudonymes trop semblables, afin d'éviter les confusions. J'en ai discuté avec l'intéressée, et voici ce que je te propose : serait-il possible de changer ton pseudonyme et de choisir un des diminutifs d'Elizabeth, afin de ne pas faire doublon ? (Le nom de baptème restant donc Elizabeth, tu n'aurais pas à réécrire ton histoire).

Ensuite un seul point me chiffonne : la profession des parents. Il est en effet assez improbable à l'époque que le père soit paysan et la mère aubergiste. Soit les deux travaillent aux champs, soit le couple tient une auberge. Je pencherais plus pour la seconde option vu le niveau social de Lizelote. D'autant plus que la scène du trajet en charrette jusqu'à la ville pourra être conservée, l'aubergiste pouvant aller échanger des bêtes, notamment des chevaux.

A côté de cela, pour une fiche si longue, je n'ai pas vu tant de fautes d'orthographe. Quelques unes cependant m'ont interpelé, et je t'en fournis la liste, que tu puisses les corriger plus vite. Ce sont essentiellement des fautes d'accord (verbe ou participe passe) :

    "On s'en fiche de l'histoire, Suzette, vient, on rentre !" -> viens

    "Zut, tu n'es pas obligé de déballer toute ma vie à un marin rond !" -> obligée, Suzette étant une fille.

    "- Fille de joie, catin, putain, choisit ce que tu veux." -> Choisis

    "Quelques filles de joie y vont, d'autre sont dehors. On est bien entretenue ici." -> d'autres. Sinon, les deux sont sans doute possiblement, mais j'aurais spontanément mis un "s" à entretenues.

    Et Lizou, elle est courageuse, voir téméraire et n'exprime jamais ses doutes. -> Voire

    Mais elle reste fière et fait celle qui n'a rien vue. -> N'a rien vu. Verbe avoir, pas de COD avant le verbe, donc aucun accord.

    On a l'impression qu'elles la regarde -> Ce sont les bêtes (au pluriel) qui la regardent.

    Elle engloutit avec faim l'assiette de potage que je lui aie proposé. Elle boit sans réflexion l'eau sale que je lui ai donné -> Que je lui ai proposé (aie est un subjonctif). L'eau sale que je lui ai donnée (verbe avoir, mais COD placé avant, donc on accorde)

    Elle a mordu sa bague, la tirée en usant de sa salive pour mieux faire glisser. -> L'a tirée

    Ces derniers ont pensé que c'était un bon partit. -> Quand il s'agit d'un parti dans ce sens-là, on écrit sans 't'. (Partit étant le verbe partir au passé simple)

    Alors voilà, s'en était fini de ses rêves. -> c'en était fini.

    Après l'avoir vu marcher et tomber, je peux dire que ses chevilles sont maigres. Et ses jambes, je ne les ai qu’entre-aperçu, elles m'ont l'air droites, sans trop de formes. -> l'avoir vue. entraperçues.

    D'accord, sans cette couche de crasses, cet air bougons -> Pas de 's' ni à crasse ni à bougon.

    C'est lui qui m'a conseillé de dissimuler quelque marchandise moins légales sous mon flot de légalités. -> Il faudrait soit tout mettre au singulier (quelque marchandise moins légale), soit tout au pluriel (quelques marchandises moins légales). x)

    C'est ce que j'ai vu, la première fois que je l'ai croisé. Je l'ai voulu. -> Croisée et voulue, puisque Beth est une femme ♥

    Ses parents n'ont guère été compliqué à faire céder. -> compliqués

    Je lui jouerais un jour un mauvais tour, pour lui apprendre le respect. -> Vu le sens, c'est un futur, et non un conditionnel : il projette de lui jouer un mauvais tour. Alors jouerai s'écrit sans s.

    J'ai décidément fais une mauvaise affaire. -> fait.

    On a partagé nos petits déjeunés. -> déjeuners, quand il s'agit du nom.

    Quatre portions de nourriture partagée en cinq -> partagées avec un 's' puisqu'on a plusieurs portions.

    Au début, il parait que Papa et Maman n'avait pas beaucoup d'espoir sur sa... chance de survie, qu'ils disaient, je crois. -> n'avaient


Et c'est tout ... Ce qui, pour une fiche de cette longueur, est tout à fait acceptable (je craignais bien plus en te voyant dire que l'orthographe n'était pas ton fort. En vérité, à part ces quelques soucis d'accord, je n'ai rien déniché de gênant, et pourtant j'ai la réputation d'être sévère sur ce point ...)
Bref, ces petites modifications apportées (je te souhaite d'ailleurs bon courage \ô/) je pourrai sans soucis te valider.

Encore félicitations pour cette belle fiche qui dû te demander du temps. En attendant ta réponse, je réserve ton avatar ♥
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MessageSujet: Re: Lizelotte Daime   Lizelotte Daime EmptySam 4 Sep - 10:49

Alors, merci pour l'accueil et la rapidité de la réponse ! Maintenant, à mon tour de répondre !

En premier lieu, ouaip, je savais pour Elizabeth, en fait, j'ai lu toute les fiches avant de m'inscrire. Maiiiis, j'avais vu un documentaire d'une Elizabeth-Charlotte, surnommée Lizelotte, j'ai bien aimé alors, je me suis entêtée à vouloir le prendre.
Je suis la première à ne pas aimer les doublons, j'ai hésité et pensé que peut-être ça irait vu que c'est Elizabeth-Charlotte et pas juste Elizabeth. Quoi qu'il en soit, je comprends parfaitement la remarque et ça ne me pose pas de problème de changer !
Ce qui est triste, en plus, c'est que j'ai passé touuuute une soirée à chercher un noms de famille en 5 lettres, à cause de ce long prénom ! ^^
Fin bon ! J'ai mit Lizelotte, j'espère que ça va !

Profession du père changée, m'sieur ! Ah, et le texte en conséquence, j'ai fait deux trois changements, pour que ça soit cohérent...

Pour l'orthographe... Aaaaah, mon bon monsieur, c'est bien mon drame, ça ! Pour être honnête, j'ai énormément relu pour arriver à ce résultat. Et comme tu peux le voir, c'est encore loin d'être parfait. J'aurais p'tet pu attendre un peu et tenter de relire à tête reposée, maiiis... J'ai voulu aller un peu trop vite, je crois. Lizelotte Daime 410907
Après, le problème, c'est que mes messages ne vont pas bénéficier du même traitement. Je relis toujours, oui, mais pas autant (bon, mes réponses sont moins longues qu'une fiche aussi). J'espère que ça ira quand même.

Merci quand même d'avoir prit le temps de tout lire, d'avoir corrigé quelques fautes (j'en ai trouvées d'autres en corrigeant ce que tu avais déjà indiqué, c'est dire si mon cas est désespéré Cool ) et des remarques en générale. J'étais bien placée pour savoir que ça prend du temps ! ^^

J'espère que tout convient ainsi !

(Et pour l'avatar, en fait, j'avais repéré l'image avant de la voir dans votre galerie ! C'est dire si vous avez bon goûts ! Lizelotte Daime Charme10 Enfin merci en tout cas ! )

Ah, et maintenant, je peux le dénoncer. C'est Serafin qui m'a amenée ! Si vous voulez le remercier (ou punir); c'est de sa faute à lui !
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MessageSujet: Re: Lizelotte Daime   Lizelotte Daime EmptySam 4 Sep - 10:55

Écoute, pour tes réponses, je pense que ça ira. Les fautes ne m'ont déjà pas semblé très nombreuses, et au pire, s'il le faut, je passerai derrière quand je le puis pour t'indiquer si je vois des erreurs vraiment problématiques (qui changent le sens d'une phrase, par exemple). Nous ne sommes pas là pour accueillir uniquement des gens qui seraient irréprochables sur l'orthographe et la grammaire, mais des gens qui font des efforts : et tu relis ce que tu postes, il me semble donc que c'est ton cas. ♥

Je te valide donc avec plaisir et t'ajoutes ton rang !

(P.S : en signature, c'est "sois" et non "soit" car c'est la deuxième personne du singulier, non la troisième. x) Promis, après, je ne t'embête plus ! )
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MessageSujet: Re: Lizelotte Daime   Lizelotte Daime EmptySam 4 Sep - 12:26

Très bien merci pour tout !

(Et flûte, pour la signature ! >.< Merci pour la remarque ! )
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MessageSujet: Re: Lizelotte Daime   Lizelotte Daime Empty

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