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 Promeneurs sans rêverie [Flashback]

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MessageSujet: Promeneurs sans rêverie [Flashback]   Promeneurs sans rêverie  [Flashback] EmptyDim 16 Jan - 0:47

[HRP : bon... j'étais déchaîné... La description du lieu sera pour le prochain post ^^]

- Si je tenais l'enfant de femme légère qui m'a indiqué cette sournoise sente boueuse qui mène... qui mène à... un tas de pierres à moitié roman et pas très gothique, je te prie de croire que je le ferait se souvenir de l'illustre nom de Malpertuis-des-bravoures jusqu'à son retour auprès du Sublime !! Il n'y rien ici, Dieu du Ciel ! Rien ! Oui je crie, j'ai le droit de crier ! Qui va m'entendre ? Je ne gène personne !
Ah le fripon ! Le scélérat ! Le fils de douze pères mi-rabbins mi-papes ! Ah le roi des fouines ! Ah le tueur de fourmis rouges ! Ah l'idiot !
Et plus idiot encore Malpertuis-des-oies-sans-tête qui le crut sur parole et le remercia de son obligeance !

Belle arche. Deux malheureuses gargouilles poreuses.

Et maintenant, Malpertuis-des-courges-prospères ? Tu es là à marcher de long en large, sous le crachin, tu t'assieds pour te relever aussitôt... Pathétique ! Pierrot-je-découvre-la-lune !... Faux-Parisien va !... bon... bon peut-être pas... (Oh Paris, Paris sous le ciel, Paris de mon âme parisienne !) Mais quand même ! Ne rien voir venir !
S'imaginer que ce serait si facile de trouver le... enfin la...

Ce qui est certain, c'est que même l'ingénieux Malpertuis-des-Lumières ne trouvera rien sous ce tas de cailloux !...
Que va dire le Capitaine – longue vie à lui et à moi – de son éloquent incapable ?! Rhâ je souffre ! Mais je souffre moins que je rage ! Et je rage moins que j'enrage !

Le maraud a trompé Malpertuis-du-soleil-et-de-la-bonne-humeur. Il a osé !
Mais si tu étais là, narine d'hérétique !, épousseteur de poussière, assécheur d'océan, canonnier mal poudré !... Je t'aplatirais ; je te décimerais ; je t'exténuerais. Refroidi. Échiné. Jugulé !! Ô crapaud, ô boue mélangée, ô poissard, ô canari fané ! Je t'écrabouillerais, je ferais de toi de petits dés, de petits copeaux, de petits atomes ! Et tu partirais dans le vent jaune des félons, pernicieux mastiqueur de faussetés !

...

Il y a quelqu'un ? Montre-toi, si tu écoutes ! Je serai magnanime, si à ta sournoise indiscrétion tu joins un rien d'honnêteté.
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Charlie Withmore

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MessageSujet: Re: Promeneurs sans rêverie [Flashback]   Promeneurs sans rêverie  [Flashback] EmptyLun 17 Jan - 14:14

Charlie Withmore ne s’était jamais considéré comme un homme particulièrement religieux. Bien sûr, dans la famille, on allait à l’église le dimanche. Le clan ne plaisantait pas avec cela, particulièrement la grand-mère paternelle de Charlie : jamais un jour n’était trop court pour présenter le respect dû au Seigneur, selon elle(1). « Il y a au-delà de ce monde des forces qui nous dépassent, et il est de notre devoir de leur rendre hommage. Des fois qu’elles nous écouteraient, autant qu’elles nous aient à la bonne. » disait souvent la sainte femme, qui avait développé l’étonnante aptitude à vivre la foi de manière toute pragmatique. Aussi, enfant, pour le petit Charlie il ne faisait nul doute que quelqu’un regardait le monde de là-haut, et qu’il valait mieux ne pas lui retourner son regard sans y mettre la bonne et due forme. Des fois que les éclairs tomberaient un peu près dans les landes. Et puis, suite à la morte de la fameuse matriarche des Withmore, le clan avait petit à petit mis de côté toute velléité consistante de rendre hommage à Dieu. On en prononçait le nom avec respect, bien entendu, et le dimanche voyait encore régulièrement la petite famille faire acte de présence à l’église, mais cela s’arrêtait là. Il n’y avait plus que le père de Charlie et la fidèle gouvernante pour éveiller les enfants à la spiritualité, et Withmore père n’y trouvait là plus vraiment de goût. Par la suite, une fois quitté son Ecosse natale pour servir la Couronne, Charlie avait eu trop à faire pour accorder au Seigneur une partie de son existence. Et puis après son temps en Afrique et les évènements dont il avait été témoin, le concept d’un Dieu d’amour et de pardon était devenu quelque chose qu’il avait maintenant bien de la peine à ne serait-ce que concevoir…

Non, Withmore n’était plus ce que l’on appelait un homme pieux, mais la spiritualité jouait encore un rôle au sein de son existence. Elle occupait souvent ses pensées, abreuvées par les nombreuses lectures et les souvenirs de toute une vie placée sous le signe de la rudesse. S’il n’avait plus l’envie de se répandre en prières, Charlie avait malgré tout gardé le goût des édifices religieux. Plus qu’une simple question de fois, ces monuments étaient pour lui des symboles spirituels, des lieux propices au recueillement et à la paix. Et puis les pierres d’une église –si modeste soit-elle- lui rappelaient souvent celles du manoir de son enfance, fondations de ses plus chers et anciens souvenirs. Ce n’était donc pas la première fois que le second du Prince des Tempêtes se rendait à l’église de Tortuga depuis qu’il s’était fait pirate. La bâtisse avait beau être en ruines, ses murs écroulés, son toit percés, ses ornements arrachés et ses vitraux cassés, il en émanait toujours cette atmosphère particulière, propice au silence.

Aussi, la diatribe enflammée de l’homme qui atteignait le monument éclata-t-elle aux oreilles de Charlie comme un coup de tonnerre en pleine mer après de longues heures du calme le plus plat. De tels éclats de voix semblaient déplacés en ce lieu, fut-il en ruines, et Withmore ne fut pas étonné le moins du monde d’y reconnaître du français. Il n’y avait bien qu’eux pour s’exclamer ainsi, comme sortant d’une quelque pièce propice aux tirades sonnantes et trébuchantes comme une bourse bien remplie l’était en espèces. Ce modèle de français-ci semblait particulièrement haut en couleurs, tant et si bien que Withmore le crut tout droit issu des pages d’un de ses recueils de théâtre. L’homme aux cheveux blonds avait une allure d’acteur en plein monologue dont le monde entier serait la scène, et la vie son public. Charlie devait à un pan de mur encore solide de ne pas être aperçu ; il s’y était assis, à l’abri des regards extérieurs, sur un vieux banc de bois rongé par le temps. Là, il avait trouvé dans les décombres une bible ancienne à la couverture cabossée, aux nombreuses pages manquantes et rendue pratiquement illisible suite à ses trop nombreuses expositions aux intempéries. Incapable de résister à l’appel d’un livre en détresse, Withmore s’en était saisi et en tournait maintenant les pages avec la plus infime précaution depuis plusieurs minutes. Elle était en allemand, une langue que ne pouvait se targuer de connaître Charlie si ce n’était quelques mots ici et là, mais il n’était point homme à faire montre de ségrégation littéraire. Un livre était un livre, et il ne pouvait s’empêcher d’imaginer l’histoire qui avait pu mener jusqu’ici l’ouvrage teuton. Mais pour l’heure, l’endroit n’était plus propices aux rêveries et, suite à la dernière déclaration du singulier inconnu, Charlie Withmore décida qu’il était temps de se montrer. Calant le vieux livre sous son bras, il se leva et sortir de l’ombre, se dévoilant enfin aux yeux du nouveau venu.

« Il n’est pas très juste de qualifier une indiscrétion de sournoise lorsqu’elle n’est pas voulue, ne pensez-vous pas ? » lança Charlie dans son meilleur français, habité par l’accent rocailleux des Highlands. «Et si c’est la discrétion que vous cherchez, peut-être serait-il alors plus judicieux de ne pas déclamer sa pensée à la ronde comme si vous étiez sur les planches. »

Et pour montrer que malgré tout, il n’était pas un mauvais bougre et qu’il n’avait nulle intention de se montrer hostile, Charlie joignit un franc sourire à ses paroles et tendit une grande main au blond français :

« Mais loin de moi l’idée de vous en tenir rigueur, monsieur Malpertuis-des-Lumières. » dit joyeusement Charlie en reprenant l’un des patronymes lancés par l’homme ainsi nommé. « Pour ma part, je crains n’avoir rien de mieux à offrir que quelque chose comme Charlie-aux-lorgnons-usés. Ou quelque chose dans ce goût là. » continua-t-il, l’air franchement amusé.

______________________________________________________________

(1)Quitte à en inculquer autrui à coups de parapluie.
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MessageSujet: Re: Promeneurs sans rêverie [Flashback]   Promeneurs sans rêverie  [Flashback] EmptyMar 18 Jan - 19:02

Il était grand. Très grand. Bien bâti, apparemment pas aggressif, mais on préférait que sa large paume fût ouverte amicalement que fermée pendant une rixe... Du moins, Malpertuis le préférait. Lui-même n'était pas petit, mais cet homme-là devait faire un sacré marin. Il parlait un français des plus corrects, quoiqu'alourdi d'un fort accent. Anglais peut-être ? Moins efféminé. De par là-bas en tout cas.

– A vrai dire Monsieur, je me croyais seul !, répondit Malpertuis en serrant chaleureusement la main de son inespéré interlocuteur.

Beaucoup d'idées lui venaient en même temps en tête, jusqu'à provoquer dans son esprit que la bruine avait un peu brouillé quelque chose comme un vacillement. Il pensa que le drôle lui plaisait bien, au premier abord. Il pensa que ce n'était pas commun que l'on s'adressât à lui si naturellement. D'habitude, tous ses interlocuteurs étaient soit désarmés, soit furieux, soit excédés, soit amusés, par sa faconde d'apothicaire raté. Il songea que leurs voix à tous deux avaient un peu le même ton, leurs phrases un peu la même musique, leur sourire un peu le même arc jovial. Un peu grisé par cette plaisante découverte, il ajouta la bouche en coeur :

– Je suis ravi de voir, Charlie-aux-éminents-lorgnons, que mon monologue un peu... atypique dira-t-on, ne vous a effrayé en aucune sorte. Rassurez-moi, vous ne comptez pas fondre sur moi, me ligoter et aller honteusement me vendre comme bizarrerie sur quelque marché malhonnête ?

Puis, juste après avoir parlé, il fut intérieurement secoué par une décharge de nouvelles idées. Il pensa que ce n'était pas commun non plus de venir se perdre entre les ruines d'une vieille église, et que peut-être cet avenant colosse y cherchait-il ce qu'on voulait que lui-même récupérât. Il s'en voulut d'avoir, comme souvent, trop parlé. « Maudit barvard ! » se morigéna-t-il. Il pensa qu'il devait orienter la conversation de manière à faire dire ce qu'il voulait entendre.
Il pensa sans doute trop. Tout le temps qu'il prit à penser, Charlie eut le temps de lui répondre...
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MessageSujet: Re: Promeneurs sans rêverie [Flashback]   Promeneurs sans rêverie  [Flashback] EmptyVen 21 Jan - 10:05

La poignée de main était ferme et donnée de bon cœur, ce qui conforta Charlie dans sa première impression du français bavard. Et bien qu’il soit de coutume pour français et anglais de se vouer une animosité aussi séculaire qu’ancrée dans les habitudes, Withmore ne mangeait pas de ce pain là. Il préférait celui qui était frais du matin, et se considérait de toute façon bien plus écossais qu’anglais. A ses yeux, n’importe quel « mangeur de grenouilles » lui paraissait tout de suite plus recommandable que le plus respectable des lords de Londres. Et puis Charlie Withmore n’était pas homme à préjugés. D’autant que plus d’une fois, la banale poignée de main, cette salutation ordinaire, suffisait à lui donner une juste impression de ses interlocuteurs. Et il appréciait celle qu’il avait du nommé Malpertuis-aux-belles-paroles.

« Bah, il faudra bien plus que de longs discours pour m’effrayer, où je ne m’appelle plus Charlie Withmore ! » lança Charlie d’un ton joyeux, révélant sans y penser son patronyme. Puis il se tut, voyant que le français continuait sur sa lancée, et le second du Prince des Tempêtes fronça légèrement les sourcils. La propension à la dérision n’était pas une tare à ses yeux, mais il y avait des sujets sérieux qu’il avait la plus grande peine à tourner en ridicule, même de la plus innocente des manières. Car selon lui il n’y avait rien d’innocent dans toute notion d’esclavagisme, et l’écossais avait été témoin de trop de drames de cette nature pour y songer sans s’assombrir. Comme tant de fois auparavant, il pensa au jeune garçon des côtes africaines nommé Oko, arraché à son foyer par des hommes sans scrupules qui n’avaient d’humanité que leur espèce. Machinalement, les doigts de Charlie vinrent voler au colifichet d’ivoire qui ne quittait jamais son cou.

« Il est des choses avec lesquelles je suis bien incapable de plaisanter, monsieur Malpertuis, et toute référence au trafic d’âmes en fait assurément partie. Je ne vous en tiendrai pas griefs –vous ne pouviez connaître à l’avance ma position- mais je vous serai gré de ne plus prendre un tel sujet à la légère en ma présence."

Mais Charlie retrouva son sourire, désireux de montrer à Malpertuis qu’il n’avait nullement eu l’intention de se montrer désagréable ; uniquement d’exposer son point de vue afin d’éviter toute mésentente. Puis il désigna l’église en ruines d’un large geste du bras, avant de reprendre la parole :

« Mais dites moi, ami Malpertuis, pour ma part je venais profiter de la sérénité de lieu; j’avoue, j’aime les vieilles pierres et leur histoire. Mais qu’est-ce qui vous amène donc à ces ruines ? Ou même, si j’ose pousser la question plus loin, qu’est-ce qui peut pousser un français à quitter ses lumières pour le brouillard de Tortuga ? »

Charlie n’avait là aucune intention de se monter indiscret ; il était simplement curieux, et ce sans la moindre arrière-pensée.
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MessageSujet: Re: Promeneurs sans rêverie [Flashback]   Promeneurs sans rêverie  [Flashback] EmptySam 22 Jan - 15:15

Mais que croyait-il, ce drôle-là ? Qu'en plus de manger des grenouilles – ce qu'au passage Malpertuis n'avait jamais fait – les Français vendaient à plaisir des êtres humains ? En dépit du fait que tous les pays d'Europe faisaient leur petit commerce de nouvelles terres et d'esclaves depuis bientôt deux siècles, même et surtout cette chère Angleterre (Withmore, Withmore... c'était bien anglais ça ! Ou par là-bas...), le naturel de Malpertuis le poussait plutôt à la froideur quant aux empires des Indes. Protestant et sympathisant des Lumières : cela faisait deux raisons de, sinon désapprouver, rester sceptique. Mais tout de même... une simple plaisanterie sans aucun fondement malfaisant...

Voilà qui était fâcheux. Malpertuis en fut un peu contrarié, puis passa à autre chose : après tout, cela lui arrivait assez souvent d'être rabroué, et comme disait ce fou de Tristan, l'habitude est une seconde nature... S'il avait bien observé quelque chose pendant ces huit années en mer, c'était qu'on supporte plus mal qu'on ne veut bien le dire la franche gaieté et les personnes vives. Malpertuis n'était pas inconséquent ; il menait son équipage avec un savoir-faire suffisant pour que même le Khazi, le redoutable second de L'Amphitrite, n'y trouvât rien à redire ! Quoiqu'il parût léger, il était tout à fait conscient de la souffrance de son prochain et de la sévérité du monde... Seulement... il avait choisi d'affronter l'horreur d'une autre manière.
Tout cela, Malpertuis eût aimé le dire, le soutenir, le défendre. Mais, fatigué par cette course inutile sous la bruine, il ne s'en sentit pas le coeur. Et puis, Charlie Withmore lui était sympathique.

Soudain, alors qu'il pensait le moins avoir à l'affronter, surgit la question que Malpertuis espérait éviter : Mais qu’est-ce qui vous amène donc à ces ruines ? Ou même, si j’ose pousser la question plus loin, qu’est-ce qui peut pousser un français à quitter ses lumières pour le brouillard de Tortuga ?

Il décida de ne pas mentir, mais de s'éviter de grands embarras – bref, de faire ce que tout bon menteur fait.

– Bon... , dit-il à voix haute.Un plaisantin m'a fait tourner en bourrique et échouer entre ces ruines ! Du reste je ne regrette pas le voyage, elles sont en effet propres aux méditations – Monsieur Rousseau, recevez mes hommages – et puis, on y fait de bien agréables rencontres !... Il se trouve que je vogue comme chef d'équipage depuis quelques années... Tortuga m'est donc familière. Vous-même semblez marin, vous savez le prix que l'on attache à l'une des rares terres où l'on peut poser le pied, fût-elle brumeuse. N'est-ce pas ?

Brûlant de curiosité, n'y tenant plus, il enchaîna immédiatement :

Pardonnez mon indiscrétion, Monsieur Withmore, mais vous parlez fort bien français, quoique teinté d'un accent que je n'identifie pas. Votre patronyme me fait pencher pour d'autres brumes, celles des îles anglaises... Seriez-vous sujet du roi George III ?


Dernière édition par Malpertuis le Mer 26 Jan - 15:33, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Promeneurs sans rêverie [Flashback]   Promeneurs sans rêverie  [Flashback] EmptyMar 25 Jan - 12:28

Charlie ne pouvait s’empêcher d’imaginer qu’il y était peut-être aller un peu fort en s’offusquant ainsi de la dérision du français. Il avait été de suite clair que Malpertuis ne pensait pas à mal, et Withmore n’était pas homme à réagir si vertement. Diable, il était même d’une tolérance reconnue et d’un comportement plutôt facile à vivre ! Mais malgré sa bonhommie naturelle, Charlie réalisait une fois de plus qu’il cachait au fond de lui des blessures aux racines profondes. Pour lui, l’esclavage ne pourra jamais être une chose prise à la légère, il le savait. Pas seulement parce que la pratique le répugnait, mais aussi parce que la chose le touchait à un niveau personnel. Il avait été témoin des horreurs de cette pratique inhumaine, aux premières loges, et jamais il ne s’était senti si impuissant. Les souvenirs de ce jour sur les côtes africaines lui laissaient rarement plus d’une nuit sans le hanter, et il porterait sans doute à jamais cette fragilité en lui.

Bien sûr, il se voyait mal expliquer tout cela à son bavard interlocuteur. Charlie n’était pas le dernier à raconter des histoires, mais il y avait des évènements de sa vie qu’il ne s’imaginait guère dévoiler au premier inconnu venu, quelle que soit la sympathie qu’il lui inspire. A bien y penser, Withmore avait même de la peine à se confier –réellement se confier- auprès des rares êtres qui lui étaient le plus proche. Mais de toute façon, Malpertuis avait l’air de celui qui mettait déjà de côté toute offense, ce qui ne pouvait que pousser Charlie à apprécier un peu plus encore le caractère agréable de son interlocuteur. Par contre, si ce dernier s’était montré bavard jusque là, il avait été plutôt vague sur les raisons qui l’avaient éloigné de sa France. Charlie ne lui en tint nulle rigueur ; tout homme –et les pirates et autres hors-la-loi plus que tout autre- avaient le droit de ne pas vouloir s’appesantir sur ce qui les avait menés à une telle vie. Puis ce fut à Charlie que les questions s’adressèrent à nouveau. Il se fit le devoir d’y répondre, sans s’y prier et avec bonne humeur :

« Je vous rejoins là-dessus, maître Malpertuis. Un marin ne serait pas un marin sans terre où accoster de temps à autres. Quant à mon français, vous me voyez flatté de vous entendre dire que je le parle aussi bien. C’est une langue que je trouve fascinante, et des plus ardues à maîtriser. » Oui, Charlie n’était pas peu fier qu’un français en personne lui fasse pareil compliment. « Quant à mon accent que vous trouvez si particulier, vous n’êtes pas loin en mentionnant l’Angleterre. Et bien que j’aie servi sous les couleur du roi en portant l’uniforme plusieurs années, je me considère comme écossais avant tout. Mais contrairement à nombre de mes semblables, je n’éprouve nulle envie de casser les bras de ceux qui nous assimilent de facto aux londoniens. J’ai appris il y a bien longtemps à faire fi des préjugés. De la même manière que je n’accorde aucun intérêt à l’animosité tenace qui, paraît-il, se doit d'être de mise entre anglais et français.»

Et c’était un fait, Charlie n’était pas de ces écossais à la fierté mal placée qui refusaient d’admettre qu’ils faisaient partie de l’Angleterre en tant que nation. Withmore avait toujours jugé les gens sur leurs qualités humaines, non sur leurs origines. Les préjugés étant presque inconnus à Withmore, il ne se souciait pas non plus des querelles séculaires qui régnaient entre anglais et français comme un mot d’ordre. Après tout, à Tortuga comme ailleurs, tous étaient des frères de la côte. Et puis Charlie revint sur la déclaration de Malpertuis sur son rôle de maître d’équipage ; c’était maintenant la curiosité de Withmore qui était piquée. Il fallait dire que le sympathique français tranchait nettement avec l’humeur plus sombre du bosco du Prince des Tempêtes, un homme certes pourvu du charisme nécessaire à sa tâche mais en la présence de qui Charlie se trouvait toujours mal à l’aise.

«Maître d’équipage Malpertuis, donc ! C’est là une tâche d’importance, mais je ne doute pas que vous sachiez y faire, avec une langue aussi bien tournée que la vôtre ! Et si je vous ai donné mon nom, je ne vous ai pas encore délivré ma fonction. Laissez-moi réparer cela aussitôt : j’officie en tant que second du capitaine sur le fier bâtiment qu’est le « Prince des Tempêtes ». Oserai-je vous demander sur quel navire vous vous êtes engagé à faire régner l’ordre parmi les matelots de l’équipage ? »
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MessageSujet: Re: Promeneurs sans rêverie [Flashback]   Promeneurs sans rêverie  [Flashback] EmptyMer 26 Jan - 15:30

Le sujet ayant été abordé, Malpertuis fit d'autant plus attention au français de Charlie Withmore. Il éprouvait une certaine admiration pour l'Ecossais – les Parisiens parlaient-ils une autre langue que le parisien ? Le français de province leur était déjà presque étranger, et ils le raillaient volontiers, dans les tavernes de Ménil-montant ou celle de Mont-martre, où l'air brouille autant l'esprit que le vin lui-même.

...second du capitaine sur le fier bâtiment qu’est le « Prince des Tempêtes » ...
Il prit cette phrase de plein fouet, comme une gifle de Kharine, comme un coup de bâton sur sa pauvre tête blonde, comme un poignée de sable dans les yeux.
Withmore ! Bien sûr ! Maintenant il se souvenait d'échos imprécis, entendus à Tortuga, ou sur le pont... Le second du Prince des Tempêtes... C'était la jolie Miss Lewis qui menait ce navire dont lui, humble Malpertuis, ne savait pas grand'chose, si ce n'étaient les plaisanteries un peu grasse des matelots et le sourire conquérant du capitaine Nogaret quand il parlait de cette « pauvre Scarlett »... Lui-même ne l'avait jamais qu'aperçue. Il n'avait d'objections vis-à-vis des autres navires pirates, que s'ils s'amusaient à marcher sur leurs plates-bandes. L'Amphithrite et Le Prince des Tempêtes se toléraient, chahutaient sans se haïr, se méfiaient l'un de l'autre en feignant de s'ignorer. Il n'en allait pas de même avec le Hell's Ship, là c'était autre chose...

- Je dois vous avouer que je ne suis pas non plus très au fait des acrimonies entre Français et Anglais, car Français je fus chassé par les Français, pour le seul crime d'avoir en partage une religion sembable à celle des Anglais... Je suis protestant, Monsieur Withmore, protestant et apatride contre ma volonté... Aventurier raté... Veuf...

Il devint plus sombre, ce qui allait mal à son visage naturellement accort. Si lui ne voyait pas d'obstacle majeur à la cordialité que leurs caractères, à Charlie et à lui, permettaient, peut-être n'en était-il pas de même dans ce grand corps écossais... Malpertuis ne put s'empêcher de fixer les impressionnants poignets de son interlocuteur - il déglutit difficilement. Agacé par le crachin qui donnait à ses cheveux des ondulations désordonnées, il dégagea son front. Soudain las de dissimuler, il acheva :

- ... Maître d'équipage sur L'Amphitrite. J'ignore si vous haïssez le pavillon sous lequel je vogue. Pour ma part, je juge plutôt les hommes que ce que l'on dit d'eux.
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MessageSujet: Re: Promeneurs sans rêverie [Flashback]   Promeneurs sans rêverie  [Flashback] EmptyDim 30 Jan - 14:05

Charlie se targuait d’avoir bonne mémoire, ce qui était là toujours utile lorsqu’on avait à se souvenir de ses ancêtre claniques sur plus de cinq générations, de tous les soldats de sa compagnie ou encore de la totalité des matelots officiant sur le pont d’un navire. Grand lecteur, l’écossais n’avait alors eu de cesse de travailler sa mémoire, apprenant à enregistrer et cataloguer toutes les informations qui défilaient devant ses yeux. De ce fait, il avait développé une solide mémoire visuelle, se souvenant de portions de textes entiers et de centaines de vers sans souffrir. Ce qui n’était guère des plus aisé à mettre à profit au sein d’une vie de forban, mais la technique avait malgré tout ses avantages. Ainsi, Charlie se souvenait très facilement de n’importe quel visage croisant son regard, l’eut-il aperçu dans une ruelle sombre entre deux chopines. S’il avait déjà croisé ce Malpertuis, nul doute qu’il s’en serait aisément souvenu. Mais ce n’était que maintenant que le français déclinait sa fonction que Charlie se rappela enfin d’avoir entendu son nom mentionné. La mémoire de Withmore n’était pas toujours des plus fidèles lorsqu’il s’agissait de remettre la main sur un nom lancé au hasard d’une conversation, et non de se remémorer une vision.

Mais maintenant que toutes les informations se rejoignaient, Charlie Withmore se serait volontiers frappé le front en poussant un sonore « Mais ça bien sûr ! » : le maître d’équipage de l’Amphitrite n’était pas inconnu au sein des conversations entre boucaniers. Seulement, Chip n’avait encore jamais eu l’occasion de mettre une apparence sur ce patronyme, et était ravi d’en avoir enfin la possibilité. Même si, pour sa part, Malpertuis ne semblait pas enchanté de la tournure de la conversation. Il en avait révélé plus sur son compte en une phrase que dans plusieurs de ses monologues, et sa fonction à bord n’était pas la moindre. Il fallut quelques instants à Charlie, tout bonhomme qu’il était, pour comprendre le malaise de son interlocuteur : la rivalité qu’il existait entre les deux navires ! L’Amphitrite et le Prince des Tempêtes étaient souvent associés l’un à l’autre ; il n’y avait que bien peu d’âmes à Tortuga qui n’étaient pas au courant de l’étrange relation, entre farouche rivalité et respect ombrageux, qui régnait entre les deux capitaines. Charlie avait plus d’une fois entendu Scarlett Lewis mentionner Louis de Nogaret, sur des tons irrités ou plus nuancés. Pour sa part, Withmore n’avait pas souvent eu l’occasion de rencontrer longuement des « amphitritons », comme on les surnommait facilement sur le Prince ou ailleurs. Et de même qu’entre français et anglais, il ne voyait aucune raison de se sauter à la gorge pour une triste question d’appartenance.

Aussi, ce fut avec un nouveau sourire franc et un geste de sa grande main dans l’air qu’il décida de chasser les inquiétudes du français :

« Il n’y a point de pavillon que je prétende haïr, sauf ceux sous lesquels voguent les canailles sans le moindre honneur et les négriers. Et je ne crois pas que le navire où vous officiez se range dans l’une de ces deux catégories. Quoi qu’on puisse en dire et malgré mon statut de princier, je n’ai aucune raison de juger durement un homme sans le connaître, fusse-t-il un « amphtriton ». Si vous me permettez l’expression. »

Peu sensible à l’ondée légère, qu’il trouvait rafraichissante, Charlie continua, désireux de dissiper tout malaise entre Malpertuis et lui :

«J’estime d’ailleurs qu’il est injuste de se prétendre aventurier raté lorsqu’on finit sur un navire comme l’Amphitrite : il y a coquille de noix bien pire où échouer. » Et puis, comme Charlie était malgré tout le second d’un autre navire, et que la fierté d’un pirate pour son bâtiment ne pouvait être ignorée, il ne put s’empêcher d’agiter : « Il y a meilleur aussi. Cela dit sans vouloir vous froisser : je me dois de vanter les mérites du Prince des Tempêtes ! Mais ne laissons pas de vaines querelles faire changer de cap une conversation qui avait plutôt bien commencé, maître Malpertuis. Dites moi plutôt comment se déroule la vie du bosco sous votre pavillon ? Maître d’équipage, ce n’est pas là la dernière des responsabilités ! »

Charlie était en effet bien curieux d’en apprendre plus sur la vie à bord de l’Amphitrite, ne serait-ce que pour avoir un regard sur les histoires passionnantes qui pouvaient se produire sur un autre navire que le sien. Après tout, ce n’était pas tous les jours qu’on avait l’occasion de rencontrer dans l’équipage d’autrui un être aussi sympathique que Malpertuis.
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MessageSujet: Re: Promeneurs sans rêverie [Flashback]   Promeneurs sans rêverie  [Flashback] EmptyJeu 3 Fév - 0:19

Un Princier ! Et les Princiers étaient bien tous les mêmes : amicaux et fiers de leur vaisseau. Le second de Miss Lewis incarnait à la perfection l'idée que Malpertuis se faisait de ces pirates-là... Pas désagréables, foi de Parisien !

- Monsieur, à bord du bâtiment du capitaine Nogaret, l'on se glorifie du titre d'Amphitrion !, assura Malpertuis en se courbant d'une manière un peu grotesque.

Il se mit alors à chercher hardiment les souvenirs qu'il avait du Prince des Tempêtes et de ses rapports avec L'Amphitrite. Rien de proprement houleux n'était advenu ; aucune querelle, aucune alliance non plus. Les deux capitaines chahutaient et se mordillaient de temps en temps, mais sans impliquer leurs équipages – tout cela avec une sagesse qui pouvait surprendre qui les connaissait, d'ailleurs. Malpertuis se retint de demander à Charlie Withmore si Mademoiselle Lewis était jolie. Une nouvelle fois, il considéra les épais poignets de son interlocuteur, et jugea bon de modérer ses traits d'esprit et ses fariboles. Le dévouement de l'Ecossais se voyait si clairement dans son regard, que Malpertuis ne souhaitait pas risquer de paraître irrévérencieux vis-à-vis de la Princière parmi les Princiers !
Comme quand on se retrouve attablés avec des étrangers on se sent patriote, à parler avec un autre pirate Malpertuis se sentit tout à coup profondément Amphitrion. Un attendrissement le parcourut : c'était un brave monceau de planches et de voiles, un fidèle guerrier grinçant, un ami des temps de famine et d'opulence.
L'assurance de n'être pas haï pour son appartenance à l'équipage du capitaine Nogaret lui rendit sa bonne humeur proverbiale, et il se montra presque sautillant en continuant à l'adresse de Charlie Withmore :

- Je suis positivement ravi de voir que, sur cela également, nous nous entendons, sir Withmore. Me voilà en parfaites dispositions de camaraderie ! (Au passage, vous me nommâtes deux fois « Maître Malpertuis », et sachez que ceci m'enchante grandement ! J'adopte !) Je serai ravi de vous faire le récit de mes gloires et mérites à la tête de mes petits gars, en échange de votre propre récit – second, nom de nom ! Vous devez connaître le second du navire qui m'abrite de réputation... Tout le monde le connaît...Il eut une moue perplexe suivit d'un geste d'impuissance, puis reprit, gaiement : Je vous dirai tout cela donc, mais avant, permettez que je palie à une urgence.

Il fronça les sourcils, prit un air important, épousseta distraitement, du plat de la main, une gargouille moussue qu'une arche effondrée mettait à hauteur d'homme, puis acheva :

- Je vais vous demander deux renseignements, si vous le voulez bien. Le premier, c'est de me donner la manière – s'il en est une – de vaincre cette bruine insupportablement lente et froide, dans les îles de sa Majesté George. Le second répond à l'une de vos questions, à savoir ce que je fais ici... Voyez-vous, j'espérais apprendre les rumeurs et certitudes qui couraient sur les pirates français. L'Amphitrite se soucie de sa réputation... Avez-vous ouï dire quoi que ce soit de probant ?
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MessageSujet: Re: Promeneurs sans rêverie [Flashback]   Promeneurs sans rêverie  [Flashback] EmptySam 5 Fév - 15:16

Et bien, ce Malpertuis était décidément d’un caractère qui ne pouvait que plaire à Charlie Withmore ! Sur une terre où chacun était prompt à juger son voisin sur des préjugés inculqués par des générations de racontars, il était toujours fort agréable de se retrouver en face d’un homme dont l’ouverture d’esprit était si naturelle. Bon, bien entendu, le monde de la piraterie n’était pas aussi étriqué que celui de la Royal Navy que Withmore avait servi. Là où le moindre écart de conduite, la plus infime différence d’avec le moule voulu se révélait vite être une tare aux yeux des confrères et des supérieurs, il en allait autrement depuis que Chip s’était fait flibustier. Non pas qu’il accordât grande importance aux étiquettes lorsqu’il portait l’uniforme ; déjà à l’époque, il se faisait presque un point d’honneur à briser l’établi séculier et monotone. Mais parmi les pirates, il importait moins de savoir quel souverain un homme servait avant de se tenir sous un pavillon noir, et les relations les plus improbables se nouaient là où elles n’auraient jamais pu voir le jour dans le cocon étouffant des sociétés bien établies. Pour autant, les frères de la côte n’étaient pas entièrement dépourvus de préjugés et autres idées toutes faites, pas plus qu’il ne se révélaient tous être des hommes d’honneur et de parole : il suffisait de voir ce que nombre d’entre eux pensaient encore des femmes, ou ceux qui n’étaient que des sanguinaires sans cœur avides de sang et de violence…

Et en parlant de pirates peu recommandable, Malpertuis ne manqua pas de mentionner sans nommer le terrible second à la sombre réputation de l’Amphitrite. Celui qu’on appelait le Khazi, et dont le tempérament était aussi redouter qu’un gros grain en pleine mer. Charlie n’avait jamais rencontré l’homme et, si ce que l’on disait de lui était vrai, il ne s’en plaignait pas. Pour autant que Chip soit prompt à juger autrui par lui-même plutôt que sur les qu’en-dira-t-on, il planait sur l’ogre de Russie une histoire obscure. On le disait cultivés et intelligent, mais aussi orageux, terrible et dur que le plus inflexible des métaux. Qu’il ne devait pas la discipline au respect et à la confiance, mais à la peur et au châtiment. Et l’amour d’une certaine culture mis à part, on ne pouvait que difficilement imaginer deux seconds plus opposés dans leur manière d’être à bord que ce Khazi et Charlie Withmore. Charlie s’était alors souvent demandé pourquoi un homme comme Louis de Nogaret avait placé sa confiance en un tel individu. Mais là encore, Charlie était loin de prétendre comprendre, ni même connaître, ce fameux capitaine de Nogaret…

« Pour autant que, comme vous, j’aime à juger d’un homme uniquement après s’y être confronté directement, je me dois d’avouer que la réputation de votre second n’est pas des plus… enjouée. On le dit redoutable et terrible, et que c’est la peur qu’il inspire qui lui permet de mener tout un équipage. »

Charlie était curieux de savoir ce que Malpertuis aurait à dire sur le Khazi, mais il continua sur sa lancée dans le but de répondre au français :

« Pour ma part, j’ai toujours penser qu’il valait mieux privilégier le respect que la crainte. Jusqu’à aujourd’hui, cette méthode ne m’a encore jamais fait défaut. Même si cela ne m’a pas épargné nombre de mésaventures. Le Prince est doté d’une histoire trépidante, mais quel bâtiment de flibuste pourrait prétendre le contraire ? C’est là le lot de notre vie. Si nous avions voulu d’une existence dédiée au calme, nous aurions fini sur le pont d’un navire marchand sans cesse condamné aux mêmes itinéraires, à la même routine… Oui, j’ai mon lot d’anecdotes sur la vie à bord du Prince des Tempêtes. Ne dit-on d'ailleurs pas de nous que l'équipage est des plus inhabituels, notamment?» Il sourit : « Quant au crachin de Tortuga, il est réputé pour s’infiltrer jusque sous vos os même à l’abri du toit le plus épais : c’est plus une ambiance qui s’en dégage que le fait d’être mouillé. »

Withmore haussa ses larges épaules, nullement incommodé par l’humidité. Une telle bruine n’était pas sans lui rappeler le climat de son Ecossa natale, et il n’était jamais aussi heureux que lorsque le ciel était gris et que les nuages laissaient se déverser leur précieux contenu. C’était peut-être là ce qui lui avait le plus manqué lors de son temps en Afrique, malgré son amour pour ce pays chaud.

« Beaucoup de gens se disent renaitre au soleil, mais en ce qui me concerne rien ne me revigore plus qu’un temps gris et son crachin. Cela doit être une question de racines. Enfin, je ne saurais vous dire si je suis la personne la plus indiquée pour vous donner les renseignements que vous cherchez. Pour autant que j’aime les histoires et me tenir au courant de tout, je n’ai que faire de toutes les rumeurs. Je crois tout de même savoir que l’Amphitrite à la réputation solide ; on dit votre capitaine élégant et rusé, et vos exploits ne manquant pas de style. »

Tandis que le crachin ambiant s’intensifiait pour se muer peu à peu en véritable pluie, Charlie souriait de sentir l’eau commencer tout doucement à ruisseler sur son visage. L’espace d’un bref instant, il parut oublié la conversation et inspira profondément, gouttant avec délice à l’ambiance si particulière du temps qui s’abattait sur l’Ile de la Tortue. Puis il reporta toute son attention amusée et propice à la digression sur Malpertuis.

« Fait-il toujours soleil, au cœur du pays des lumières ? J’avoue n’avoir jamais eu l’occasion de m’aventurer plus loin que la côte de Saint-Malo lors de brèves escales, et que je ne connais finalement de la France que ce que l’on veut bien en dire, et ce que j’ai pu en lire. »
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MessageSujet: Re: Promeneurs sans rêverie [Flashback]   Promeneurs sans rêverie  [Flashback] EmptyLun 7 Fév - 11:12

Mais quel homme était-ce là ? Quoiqu'il s'empêchât de trop s'abandonner à l'enthousiasme, Malpertuis sentait croître en son âme bavarde les prémisses d'une franche estime.

- Vous lisez, Milord ! Cria presque le Français. Dites donc lesquels de ces divins emportements que sont les lectures ont votre préférence ? Que pensez-vous des Lumières, de Monsieur Voltaire et de son affaire Calas – prions que le siècle lui donne raison et qu'il gagne ce combat là ! - de Monsieur Diderot et de l'Encyclopédie ? Croyez-vous que nous sortirons de ces médiévismes qui empêchent le progrès des techniques et le déploiement de l'âme humaine ?... Pensez-vous...

Mais il s'interrompit brusquement, tout à coup gêné. Comme dans tout enthousiasme, il y avait dans celui des Lumières quelque chose comme une tristesse en creux, un abattement sans cause mais qui saisissait pourtant jusqu'au roi des bavards. Du reste, a-t-on idée d'ainsi s'épancher devant un quasi inconnu ? La sympathie que lui inspirait Charlie Withmore n'était pas suffisante pour qu'il se laissât aller à des élans lyriques ! De la retenue, que diable, emporté Parisien !

Cette pensée lui permit de rebondir sur un autre sujet :

- J'ai peur, Milord, d'être un de ces faiseurs d'éloges qui voient dans leur terre natale le vestige de l'Eden... Il faut bien dire que Paris n'est pas toujours nimbée de soleil, loin s'en faut ! Mais elle est moins grise et brumeuse que Londres – que je vis presque par accident, alors que je m'exilais – ou que cette morne Tortuga aux poisses admirables !
Mais si vous voulez mon avis, je pense que le pire climat est celui des cercles russes, et pour avoir comme second Monsieur Staas, « Le Khazi », comme on l'appelle, je puis vous dire que je sais quelque chose de l'humeur des gens de neige et de froidure ! C'est un homme...
Malpertuis eut une moue lourde de sous-entendus. Un homme... d'une grande efficacité. Je partage plutôt votre opinion : je favorise toujours le respect à la crainte aveugle, quoiqu'il ne faille surtout rien permettre en terme de désobéissance, et qu'il faille savoir être ferme jusqu'à la dureté. Vous devez le savoir aussi bien que moi : on ne tient pas trente hommes avec des habitudes de salon ! Mais tout de même... Ces dos en sang... Une pensée pour le Corbeau tordit le visage de Malpertuis d'une sorte de chagrin. Je m'attache à la clémence vis-à-vis des mousses, voyez-vous... Ce n'est pas par extrême sensibilité, mais il m'apparaît comme... vous allez rire : il m'apparaît lâche de s'en prendre à des gosses qui ont si peu de moyen de se défendre. C' n'est pas correct...

Il secoua la tête comme pour se débarrasser de souvenirs qui l'affligeaient, et reprit, sur un ton jovial qui sonnait un peu faux :

- Mais enfin, les ordres sont les ordres. Je ne conteste pas ! Le capitaine Nogaret est un homme honorable qu'il me plaît de suivre, il a choisi ce second, voilà tout ! Mais je parle trop, pardonnez-moi...

Il avait parlé vite, ce qui avait contraint Charlie Withmore à l'écouter sans intervenir. Le Maître d'équipage s'en voulut un peu. Il n'avait rien appris de ce qu'il cherchait, et il s'épanchait peut-être plus que d'habitude – plus sincèrement en tout cas. Sans relâche, la tristesse enrobée de gaieté de Mapertuis se défendait contre l'idée que, peut-être, dans ce monde-là, ni meilleur ni pire que les autres, parmi les pirates, il pouvait exister un élan qui ne fût pas trop éloigné de l'amitié.
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MessageSujet: Re: Promeneurs sans rêverie [Flashback]   Promeneurs sans rêverie  [Flashback] EmptyJeu 10 Fév - 10:11

« Holà, quelle verve, maître Malpertuis ! » commenta joyeusement Charlie dès qu’il eut à nouveau l’occasion de placer un mot. Le français avait visiblement la langue déliée de nature, jetant des mots comme emportés par le courant d’une rivière en crue que la digue de l’esprit avait du mal à retenir. Ceci étant dit, cela ne gênait nullement Charlie, qui avait toujours aimé écouter les gens parler. Il avait alors simplement attendu que son compagnon termine, sans l’interrompre, avant d’avoir l’occasion de rebondir sur ses mots. « Je présume donc que vous êtes vous-mêmes amateur de belles lettres ! Cela fait plaisir de l’entendre. Par contre, je prends le risque de vous décevoir en avouant que je n’ai pas suivi les rebondissements de cette affaire Calas, et que l’encyclopédie de Diderot n’est feuilletée qu’à l’occasion. J’ai certes du plaisir à m’éveiller l’esprit au contact de grands penseurs et ne crache jamais sur un traité de philosophe ou un autre, mais je n’aime rien tant que la lecture d’un bon roman. Pour moi les histoires sont les fondements de l’écriture, et me plonger dans une nouvelle aventure est toujours source d’un grand émerveillement ! De Voltaire, j’ai grandement aimé les aventures de ce sacré Candide, car l’ouvrage combine l’effort de la pensée et les joies d’une histoire et de ses péripéties. Je suis entre autres féru de Swift, Defoe ou encore Samuel Johnson, pour citer des auteurs proches de mes racines. J’ai la chance de m’être fait à Tortuga même un contact improbable en la personne tout aussi improbable d’un nain allemand qui réussit à faire vivre son commerce de livres en tout genre au milieu de pirates et d’insulaires pas toujours avides de lettre. Je pourrai vous plus, s’il s’avère que vous ne connaissez pas déjà le lieu. »

Diantre, cette fois-ci, c’était Charlie qui avait du mal à retenir sa langue ! Il faut dire qu’il était ravi d’avoir un tel interlocuteur, et qu’il comptait bien en profiter !

« Quant aux lumières, j’espère vivement qu’elles contribueront à nous extraire de ce médiévisme, comme vous dites. Il serait grand temps que nous nous réclamions vraiment de notre humanité ! Mais je n’y croirai que lorsque, notamment, je ne verrai plus de navires de négriers écumer les côtes et des hommes vendus comme des marchandises… » Charlie s’assombrit un instant, mais refusa de s’épancher plus en avant sur le sujet, s’efforçant lui aussi à garder une certaine retenue. Il changea alors de sujet, se basant sur les dires précédents de Malpertuis. « J’ajouterai aussi que notre humanité ne s’en tirera que mieux lorsque nous cesserons de croire qu’il nous faut user de la force pour se faire écouter. Votre Khazi est peut-être efficace et je n’ai nulle prétention de remettre en cause le jugement de votre capitaine, mais pour ma part je compte sur les doigts d’une main les fois où j’ai dû la lever contre un membre d’équipage ou même un soldat sous mes ordres du temps où j’étais à la Royale. Et ces rares fois étaient presque toutes en cas de légitime défense. Cela a suffi à montrer que j’étais sérieux et guère prompt à la plaisanterie dans l’efficacité de mon travail. Depuis, les racontars suffisent à ma tâche, ne me donnant plus l’occasion d’inculquer le respect par la force. Et j’en suis bien content ! Et je ne peux qu’approuver lorsque vous dites qu’il n’apparaît pas correct de s’en prendre à un jeune mousse sans défense. Une telle manière de faire ne serait pas tolérée sur le navire où je sers ; et si elle le devenait, je serais le premier à quitter son bord, croyez moi sur parole ! »

Puis soudain, Charlie se tut et éclata d’un bref rire rauque et sincère. Il se frotta le visage humide d’une manche de sa chemise blanche, elle-même plus très sèche, puis reprit sa contenance sans pour autant cesser de sourire.

« Vous êtes pardonné de parler autant, maître Malpertuis, bien entendu ! Il semblerait que je souffre de la même affliction ! Mais n’est-il pas agréable que même un lieu comme Tortuga, nous trouvions quelqu’un avec qui laisser nos langues s’agiter sans devoir à sans-cesse les retenir ? »

Oui, Charlie était content de se sentir aussi libre à la discussion. Dans un monde où il était toujours difficile de ne pas froisser son voisin –fut-il lord anglais ou pirate sans foi ni loi- rien n’était plus rafraichissant qu’un homme qui ne souciait pas de préjugés et d’idées toutes faites. Et que même parmi les flibustiers, il pouvait émerger la graine de sincères amitiés.
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MessageSujet: Re: Promeneurs sans rêverie [Flashback]   Promeneurs sans rêverie  [Flashback] EmptyDim 27 Fév - 22:12

Dame fortune n'est pas toujours l'âme des plus charitables. Capricieuses et lunatiques, les vagues de ses envies caressent ou écrasent le destin des hommes.

Sous les houles fraîches qui venaient rouler entre les pierres de l'église, ses longs doigts gracieux vinrent caresser le dialogue, esquisse d'amitié.
La journée était assez claire, quoique le ciel se parsemât de nuages grossiers, et que le vent commençât à gronder entre les ruines pieuses.

Un peu en contrebas, loin des regards, un groupe disparate rôdait, assez peu dévot pour dire vrai. Les différentes silhouettes, épaisses et balourdes, maigrichonnes et nerveuses, avaient depuis quelques temps remarqué la mascarade des deux forbans.

-Les v'la qui discutent comme d'bons samaritains. J'croyais qu'ça avait des tronches d'crapules, mais ça m'a plus l'air de femmelettes !

La voix rocailleuse -roulis de pierres rudes sur une langue âpre- appartenait à un brigand qui n'était certes pas des plus craints, mais qui excellait en son métier. Si le titre de métier puisse vraiment s'appliquer à ce genre d'activité. Le visage buriné et l'oeil gauche en moins, son physique des plus disgracieux aidait. Il avait comme ce qu'on pourrait dire la tête de l'emploi. Il ricana un peu, pour la forme, entraînant les rires gras de ses compagnons. Mais l'heure n'était pas aux farces, et sous l'imposante quoique fatiguée maison du seigneur, ils s'approchèrent les uns des autres. Le temps, sûrement, de trouver le meilleur moyen d'attaquer les deux bavards.

Il ne leur fallut que peu de temps pour se mettre d'accord. L'attaque par surprise était encore le moyen le plus efficace de mettre hors d'états de nuire les causeurs. Sûr que leurs jolies poches devaient bien contenir quelques piécettes. De quoi permettre aux brigands de passer une nuit agréable entre les cuisses d'une élégante.

Le vent, qui sifflait aux oreilles des deux pirates, avait ce quelque chose du rire moqueur. Triste ironie du sort, trop pris par leur conversation, ils n'entendirent pas les railleries de Dame Fortune.

- Vous êtes pardonné de parler autant, maître Malpertuis, bien entendu ! Il semblerait que je souffre de la même affliction ! Mais n’est-il pas agréable que même un lieu comme Tortuga, nous trouvions quelqu’un avec qui laisser nos langues s’agiter sans devoir à sans-cesse les retenir ?

Lorsqu'il finit sa phrase, la joie fut sûrement de courte durée. S'il était agréable de rencontrer sur cette île insalubre et humide un gentleman français, y rencontrer des bandits de grands chemin l'était sûrement moins. Surgissant de derrière la dévote bâtisse, les corps tordus par l'impatience se ruèrent en avant, armes brandies.

Peut-être eut-il fallut qu'ils sachent que les deux babilleurs n'était pas que de simples intellectuels. Mais ils n'en savaient rien, et couverte par les éclats de feu, Dame Fortune rit un peu plus encore.

Spoiler:
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MessageSujet: Re: Promeneurs sans rêverie [Flashback]   Promeneurs sans rêverie  [Flashback] EmptyMer 2 Mar - 21:20

Vraiment le sort était hargneux. D'abord cette course en vain sous le crachin, qui finalement s'était soldée par une heureuse rencontre (malgré une légère tension quand il avait su qu'il se trouvait face au second de Miss Lewis), et maintenant une bande de malappris, visiblement décidés à en découdre.

Voyant venir à eux l'hostile déferlement de bandits, Malpertuis tira son sabre – si brillant d'avoir été soigneusement et longuement nettoyé, comme pour cacher qu'il en avait vu, des intérieurs de bedaine et des cous crasseux. Il est parfois étonnant de voir où vont se loger la pudeur et la délicatesse, chez les pirates...

- Messire, je crains que nous ayons de la compagnie... et par surcroît sans manières aucunes !

Ils étaient nombreux, les bougres ! Instinctivement, Malpertuis et Charlie Withmore s'étaient mis dos à dos. On s'apercevait vite de la longue expérience qu'un Maître d'équipage et un second de navire pirate peuvent accumuler, au gré des voyages et des escales. Vie dangereuse. Vie sanglante. Vie de demi-pendu. Malpertuis grinçait des dents quand il pensait à cette vie-là. Se penchant un peu en arrière, pour que l'Ecossais l'entendît, le Parisien souffla :

- Je doute que ce combat-là entre dans la légende, mais je suis plus heureux de me battre à vos côtés qu'à ceux de bien des hommes sur terre ou sur mer, Monsieur Withmore... même... même la plupart de ceux de L'Amphitrite.

Après tout, ils y resteraient peut-être, alors que lui importait d'avoir un peu froissé le sens de la solidarité normalement en vigueur sur un navire ? Du reste il n'y avait pas de témoin. Quant au protestant qui restait malgré tout en Malpertuis, il préférait être tout à fait sincère, pour le cas où un entretien avec le Très Haut arriverait plus vite que prévu.

Puis ce furent les premiers coups. Les deux pirates formaient une équipe redoutablement efficace. Malpertuis ne s'était pas trompés, en pensant que leurs natures étaient proches : leurs réflexes étaient semblables, et sans trop se concerter, ils se mouvaient sans jamais entraver l'autre ni l'exposer. Roi parmi les bavards, Malpertuis parlait à voix haute en se battant, comme pour signifier qu'il vivait toujours :

- Recule, malodorant personnage ! Et toi, face de Bordelais, oui toi ! Viens-là, vilain merle. Ma parole, mais il est maigrelet celui-là... J'y suis ! Vous mangez des pierres, c'est ça ? Nous vous dérangeâmes en plein repas ! Toutes nos excuses vraiment... N'est-ce pas, Monsieur Withmore, cria-t-il à son compagnon d'arme,, que nous sommes bien marrys d'avoir molesté de si exquises personnes ?!

Non... Même au péril de sa vie, même sabre au clair dans les ruines de l'église de Tortuga, même à deux contre dix ou douze, Malpertuis ne se tairait pas...
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MessageSujet: Re: Promeneurs sans rêverie [Flashback]   Promeneurs sans rêverie  [Flashback] EmptyDim 6 Mar - 12:07

Des choses se passent. C’était là l’un des concepts de base de l’univers, un des fondements sur lequel toute sa structure reposait. Un amoncèlement d’évènements qui se produisaient sans cesse, surgissant du vide et séparant le monde du néant. Et ces évènements déclenchaient des réactions, qui à leur tour demandaient des réponses. Un grand ballet de cause à effet, où les danseurs étaient rarement gracieux et où il était très facile de se prendre les jambes dans le tapis du cosmos. C’était cela, ou bien le simple fait que les dieux avaient un sacré sens de l’humour tordu. Toujours était-il qu’une combinaison sans doute complexe d’éléments avaient amené ces brigands à ce point précis, en ce jour particulier, à ce moment présent. Un moment que Charlie Withmore avait espéré tranquille en se rendant plus tôt en ce jour aux ruines de l’église, sous la bruine de Tortuga. Là, dans la spiritualité qui s’accrochait aux décombres comme le lierre obstiné, l’homme avait trouvé une vieille bible et s’était réjoui de sa découverte, ajoutant ainsi un ouvrage à sa collection de livres en tout genre. Et puis le français était arrivé, et Charlie avait rencontré en Malpertuis un pair éminemment sympathique que même la rivalité de mise entre leurs équipages ne ternissait pas. Alors, comme soucieuse de rétablir une sorte d’équilibre bien à elle, la fortune s’était décidée à s’en mêler, envoyant à eux une marée non pas de vagues déchaînées en pleine mer, mais une marée de malandrins s’imaginant tomber sur des proies faciles.

Et bien ils auraient difficilement pu tomber plus mal.

Les réflexes de Charlie et Malpertuis, régis par toute une vie qui n’avait jamais vraiment été roses, avaient répondu avant même que les deux pirates ne réalisent pleinement la nouvelle situation. Instinctivement, ils s’étaient retrouvés dos à dos afin de ne pas laisser un seul angle mort à ces fripouilles, qui en parurent un brin décontenancées. Dans leur petit monde simple de brigands sans éducation, deux gentilshommes parlant littérature dans les ruines d’une église, ce n’était pas censé réagir au quart de tour lorsqu’on leur tombait sur le coin de la pomme. Sabres au clair, les deux nouveaux amis attendaient leurs assaillants de pied ferme, et Charlie hocha la tête aux dires de Malpertuis, auxquels ils s’empressa de répondre avec un élan de sincérité qui venait du cœur :

«Maître Malpertuis, c’est pour moi un honneur que de combattre à vos côtés. Quoi qu’on en dise, un prince et un amphitriton peuvent faire très bon ménage, comme nos nouveaux amis vont le découvrir à leurs dépends ! »

Et, sans plus de cérémonies, ce fut l’échauffourée . Remis de leur bref instant de perplexité, les bandits avaient repris le courage pleutre que leur procurait leur nombre et s’étaient relancés à l’attaque, encerclant ceux qu’ils avaient encore le fol espoir de considérer comme des victimes. Callant son livre sous son bras gauche, bien décidé à ne pas perdre sa trouvaille, Charlie tenait son sabre dans sa main droite, fidèle compagne depuis de nombreuses années. Lorsqu’on apprenait à se battre et que la survie dépendait du talent en la matière, une longue expérience faisait souvent de l’arme une extension de son propriétaire plutôt qu’un simple objet. Ce n’était jamais plus vrai qu’en voyant Malpertuis et Withmore tenir tête à leurs assaillants. Sans jamais leur céder de terrain, les deux hommes paraient, esquivaient et se lançaient en bottes audacieuses et efficaces que leurs adversaires avaient bien de la peine à ne pas laisser passer. D’un puissant coup de sabre dans lequel il avait mis toute la force de son bras épais, Charlie avait fait sauté la lame de la prise d’un brigand et l’avait jeté à terre d’un coup de pied bien placé. Juste à temps pour relever son épée et arrêter le coup de dague audacieux d’un malandrin plus dégourdi que les autres. Derrière lui, Charlie pouvait entendre Malpertuis bavarder comme s’ils étaient en train de prendre le thé plutôt que de combattre pour leurs vies, et l’écossais ne put s’empêcher de sourire. Quant aux vilains, ils en semblaient déstabilisés, guère habitués à ce que leurs proies leur fassent la causette. Mais Charlie, dans l’action, était homme de peu de mot, aussi se contentait-il de grogner d’amusement à l’une ou l’autre remarque de son compère, sous l’effarement de leurs adversaires. Avec habileté, Charlie coinça la dague de son assaillant contre le pommeau de son sabre, et abattit la fameuse bible sur le crâne du drôle, qui s’écroula, terrassé par la foi. Sans s’arrêter là, Charlie plongea alors sa lame ainsi libérée dans l’ouverture d’un autre coquin, le sang colorant le sabre. S’il ne pouvait voir les prouesses de Malpertuis, Charlie se rendait bien compte que le français ne s’en laissait nullement compter non plus, et le nombre de leurs assaillants encore en état de se battre commençait à diminuer, de même que leur courage… Leurs attaques se faisaient plus désordonnées, leur cohésion presque nulle. Ils avaient beau agir en bande, ils n’étaient pas frères d’armes pour autant…

Comme on le dit, des choses se passent. Et pour une bande brigands sous les voûtes en ruines de l’église de Tortuga, elles se passaient vraiment très mal…
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MessageSujet: Re: Promeneurs sans rêverie [Flashback]   Promeneurs sans rêverie  [Flashback] EmptyJeu 10 Mar - 9:27

Quand Malpertuis se tourna vers Charlie Withmore, il considéra l'hécatombe dont le Princier était l'auteur avec une certaine déférence. Soulevant rapidement son tricorne pour féliciter son allié, le Français le remit immédiatement en place sur sa blonde tête et reprit la lutte. Le brigand qu'il affrontait avait une tache de vin sur la joue droite, ce qui, en quelque sorte, fut une aubaine pour le roi des bavards...

- Alors toi ! Tu es plus vilain encore que les autres ! Oh l'affreux, oh le nauséabond ! Arrière, face laideronne ! Arrière !

Et à chaque fois qu'il criait "Arrière !", le malheureux reculait de quelques pas. Finalement, trébuchant sur un corps étendu, le voleur tomba sur le dos et, presque innocemment, Malpertuis mit son sabre sous le menton du vaincu.
Comme le combat s'était calmé, Malpertuis se jugeait en droit de marquer un rien de noblesse dans toute cette crasse... Quel gâchis, vraiment !

- Je suis dans un jour de bonté, rends grâce dans ta religion ; je t'en laisse le temps. Une façon de te dédommager de ce que la Nature a infligé à ton visage.

L'homme fit le signe de croix, et hocha la tête en signe de gratitude - du moins, c'est ce que pensa comprendre Malpertuis. Alors que le Français levait déjà le bras pour porter le coup de grâce, sa victime retarda le coup en s'écriant :

- Une dernière faveur !

- Parle.

- Quel est le nom de mon assassin ?

- A quoi cela servira-t-il ? Tu seras mort dans quelques minutes. Du reste, je n'aurais jamais attenté à ta vie si tu n'avais essayé d'attenter à la mienne.

- Accord'ça à un homme qui va mourir, Seigneur.

La flatterie n'est pas bon signe sous ces cieux-là. Malpertuis pourtant le savait, connaissait parfaitement Tortuga et la manière d'y demeurer en vie, mais il était un peu las, un peu étourdi par le combat aussi sans doute...
Cependant qu'ils parlaient, un autre brigand insidieusement s'avançait. L'Écossais finissait d'occire - avec art - ses deux derniers adversaires. Le dos de Malpertuis était dangereusement exposé, et ses réflexes se ralentissaient.

- Je suis Malpertuis... de Paris., lâcha le Maître d'équipage de L'Amphitrite à contrecoeur.

- Français ! Et chef de pirates, à tous les coups ! Sinon tu' t'battrais pas avec ces airs d'gentilhomme ! La tête d'un pirate français mise à prix ' y a déjà des années vient de doubler de valeur... Une vieille famille bretonne qui l'exige, qui l'a fait valoir jusqu'à Versailles... Nogaret qu'il s'appelle. Tu l'connais ?... Oui tu l'connais. J'parie même que tu sers sur son raffiot !

A cet instant, Malpertuis comprit. Il se retourna et eut tout juste le temps d'empêcher un coup de dague de l'abattre purement et simplement. Le brigand qui l'avait distrait se remit debout d'un bond, et ils furent bientôt deux contre lui, que l'information troublait. Il se sentit soudainement éreinté, il ne faisait plus que défendre sa vie - ce qui n'est pas assez quand on doit faire face à deux adversaires.
Sentent trop bien qu'il ne tiendrait pas longtemps, Malpertuis fit ce qu'il n'avait jamais fait en pareil cas : il demanda de l'aide.

- Withmore ! A moi !


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MessageSujet: Re: Promeneurs sans rêverie [Flashback]   Promeneurs sans rêverie  [Flashback] EmptyDim 13 Mar - 13:22

C’était peut-être là un fait étrange pour un ancien soldat et un pirate, mais Charlie Withmore n’aimait pas se battre. Il faisait partie de ces gens dotés d’une forte carrure qui s’habillaient de leur force comme un manteau dissuasif, comptant sur le bon sens d’autrui pour éviter d’en venir aux mains. Ce n’était toujours qu’en dernier recours que Charlie jouait du poing ou tirait son sabre, et s’il mettait un point d’honneur à rester au sommet de sa forme et de ses techniques, il rechignait à en user à moins que ce ne soit absolument nécessaire. Noble ou bandit, pirate ou soldat, Charlie se disait au fond de lui-même que nul ne méritait de périr au combat. Il n’y avait bien que les esclavagistes qui ne trouvaient grâce aux yeux de l’écossais… Malgré tout, ce n’était pas ce qui empêchait Withmore de se défendre et de tuer lorsque sa vie ou celle d’un autre était en danger. Lorsqu’il le fallait, il n’hésitait pas à porter le coup fatal et sa résolution n’était plus à prouver. Mais même si il s’y montrait habile, Charlie n’aimait pas se battre, et il n’éprouvait jamais de plaisir à ôter une vie.

Il ne sentait plus le dos de Malpertuis collé contre le sien mais, l’entendant toujours jacasser, se dit que le français maitrisait parfaitement la situation de son côté. En ce qui concernait le sien, Charlie faisait encore face à deux adversaires dont la motivation palissait à vue d’œil. Ils s’étaient attendus à des proies faciles, à des intellectuels incapables de tenir une épée par le bon bout et voilà qu’ils s’étaient retrouvés face à deux formidables loups de mers. Dans leur surprise, ils avaient perdu toute synchronisation et frappaient avec l’énergie du désespoir. Grognant, Charlie para un énième coup de sabre dans un fort tintement métallique, et le malandrin dut sentir le choc se répercuter tout le long de son bras si l’on se fiait à sa grimace. Son compère crut alors voir une ouverture mais, vif comme l’éclair, Charlie fit un petit bon en arrière et l’acier ne mordit que le vide. Ces coquins n’étaient vraiment pas des escrimeurs hors-pair, se contentant sans doute généralement de leur nombre pour submerger leurs cibles sans défenses. Déséquilibré par sa frappe dans le vide, le vilain reçut un violent coup de genou de la part de Charlie dans le bas ventre. Le souffle coupé, il s’écroula avec un râle, lâchant son arme dans la poussière détrempée par la bruine ; d’un coup de botte, Withmore envoya l’arme hors de portée et pu reporter toute son attention sur le second assaillant… qui en avait profité pour fuir. Lâchement, il s’était mis à courir le long du chemin comme s’il avait le diable aux trousses et fut bientôt hors de vue. Ce n’était décidément pas le courage qui les étouffait, ses gaillards… D’un coup de pommeau sur le crâne, Charlie assomma pour le compte celui qui gargouillait sur le sol, juste à temps pour entendre le cri de détresse de Malpertuis.

« Bon sang ! » grogna l’écossais, se précipitant à la rescousse de son nouvelle amis, pris en traître entre deux manants. Avec un cri formidable qui tenait du rugissement, il fut sur les couards, en saisissant un par le dos. Bandant ses muscles, Charlie souleva le lascar et l’envoya s’écraser contre le mur de pierres semi-écroulé de l’église en ruine. Et l’instant d’après, voilà que Charlie luttait côte à côte avec Malpertuis contre le dernier bandit encore capable de se battre, celui qui avait distrait le français et qui connaissait maintenant la déconfiture d’être à un contre deux, lui qui ne devait déjà rien connaître du combat singulier. Derrière, l’homme sonné contre la pierre s’était relevé, en sang, pour vaciller jusqu’à celui que Withmore avait assommé et qui s’éveillait en grognant. Jugeant manifestement que le jeu n’en valait pas la chandelle, et certainement pas liés par la camaraderie, ils prirent à leur tour la fuite clopin-clopant, se soutenant mutuellement.

« Lâches ! Pleutres ! A moi, à moi ! » hurla le dernier, qui perdait sans cesse du terrain, cédant à l’avancée implacable des deux pirates jusqu’à se retrouver coincé dos au mur de l’église. D’un habile coup d’épée, Charlie fit sauter la sienne, qui allait se planter dans la terre un peu plus loin. L’homme tomba à genou, la peur imprimée sur son visage tandis que Charlie appliquait la pointe de sa lame sur sa gorge, faisant couler un mince filet de sang. Le tenant ainsi en respect, l’écoutant crier grâce d’une oreille distraite, il tourna la tête pour contempler Malpertuis, qui ne semblait pas blessé :

« Je n’aime guère prendre une vie, même si elle a aussi peu de valeur que celle de ce misérable… Mais je crois que la décision vous revient, cher maître. »

Et Withmore attendit tandis que le bandit sanglotait, curieux de voir comment le français allait gérer la situation, maintenant que l’homme qui l’avait mené en bateau se trouvait à sa merci…
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MessageSujet: Re: Promeneurs sans rêverie [Flashback]   Promeneurs sans rêverie  [Flashback] EmptyMer 16 Mar - 8:59

L'efficacité du Princier était telle, que Malpertuis fut tiré de sa fâcheuse situation en moins de temps qu'il ne faut pour l'écrire. Le combat était déjà fini, seules restaient menaçantes les paroles du malotru. La prime pour la tête de Nogaret avait doublé... Cela ferait pourtant bientôt six ou sept ans l'été prochain que le capitaine voguait sur la mer des Caraïbes, parfois même aux abords de l'Europe, sur un bateau sans pavillon.

Du misérable que Charlie Withmore tenait en respect, Malpertuis n'avait que faire. Mais cette histoire de prime était exactement le genre de renseignement que Louis de Nogaret l'avait envoyé cherché, et le Maître d'équipage songea que plus il en saurait, mieux cela vaudrait.
Il s'adressa donc au brigand avec une férocité toute joviale, dont sans doute il était le seul capable de ce côté-ci de l'océan.

- Voilà ce que c'est, de se battre contre des chefs parmi les pirates ! J'espère, maraud, que tu auras retenu la leçon qu'aux enfants de Paris on inculque depuis le berceau : les apparences trompent souvent. C'est aussi la preuve qu'on peut être élégant et ne pourtant rien refuser des combats virils. Permets-moi de te dire, nauséabond idiot, que ta manière de supplier – et d'ainsi gâcher ma faconde ingénieuse – est tout à fait ridicule.

Il voulut saisir le voleur par le col, mais celui-ci de débattit, de telle sorte que Malpertuis faillit tomber à la renverse et que Charlie Withmore dut s'efforcer de maintenir sa lame en place tant bien que mal. Comme un animal apeuré qui se précipite sur le péril qu'il croyait fuir, le brigand vint s'épingler sur le sabre du Princier. Cela n'avait duré qu'un instant, mais la blessure au cou était fatal.

- Quel idiot !, tonna Malpertuis.

Cette fois, il saisit l'homme par le haut de son vêtement, et le secoua.

- Parleras-tu ? Ce pirate français, que sais-tu de plus de lui ?

Evitant de trop révéler devant Charlie Withmore, qu'il appréciait mais qui était tout de même aux ordres de Miss Lewis, Malpertuis tenta en vain d'obtenir plus de renseignements du coquin qui se vidait de son sang. Celui-ci pâlissait à vue d'oeil, très vite, sa respiration fut un râle. Le Parisien le lâcha avec une grimace un peu douloureuse.

- Ce que je n'aime pas le regard qu'ils ont à ce moment-là... , murmura-t-il en baissant la tête.

« Ce moment-là », c'était le passage de vie à trépas. Un regard à l'Ecossais fit comprendre à l'Amphitrion qu'il n'était pas le seul à ne pas se repaître du spectacle d'une mort violente. Etrange pour des pirates, pensera-t-on, mais ce n'est pas l'aptitude en une matière qui nous inspire seule le goût que nous y prenons.

Malpertuis rengaina son sabre – qu'il faudrait nettoyer dès que possible – et tendit la main à Charlie Withmore.

- Ce fut un plaisir, Monsieur le second. Pardonnez-moi le brusque congé que je dois prendre, mais mon capitaine m'attend, je dois m'acquitter de mon devoir. Nous nous recroiserons, n'est-ce pas ? J'ai quelques facilités à obtenir du rhum à la Jambe de Bois, je serais ravi de vous en faire profiter. Vous avez désormais en Malpertuis – Malpertuis le fou, Malpertuis-des-Lumières, Malpertuis roi des bavards et Parisien illustre – un ami indéfectible. Si un jour vous vous trouvez dans le besoin, vous n'aurez qu'à le faire savoir. Adieu, Milord.

Et cela faisait au roi des bavards, au Parisien illustre, comme un pincement au coeur.

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MessageSujet: Re: Promeneurs sans rêverie [Flashback]   Promeneurs sans rêverie  [Flashback] EmptyMer 16 Mar - 12:15

Et bien les choses s’étaient terminées meilleures qu’elles ne l’auraient pu étant donné les circonstances. L’île de Tortuga était débarrassée de quelques âmes de coquins, et ceux qui avaient fui dans la nature y réfléchiraient sans doute à deux fois avant de s’en reprendre à quelque « intellectuel sans défense ». Pour autant qu’ils puissent réfléchir plus d’une fois, bien sûr. Il ne restait maintenant plus que celui qui avait mené la charge et dont les suppliques grouillantes pendaient à la point de la lame de Charlie. Malpertuis était fort heureusement indemne, et Charlie attendait donc patiemment que le français règle son compte avec la fripouille.

L’air de rien, impassible, il écouta l’interrogatoire de Malpertuis, qui semblait fort pressé à l’idée d’obtenir quelques informations de la part du brigand. A la mention d’un pirate français, Withmore se demandait s’il pouvait s’agir ici du passif de Malpertuis qui surgissait, mais en conclut qu’il devait s’agir d’autre chose. Peut-être était-il question du capitaine de l’Amphitrite, car on ne faisait guère pirate français plus reconnu que Louis de Nogaret par les temps qui courent. Sans en être absolument certain, Charlie se dit que c’était là une possibilité raisonnable et s’en promit d’en toucher deux mots au capitaine Lewis. Elle serait sans doute intéressée d’apprendre une telle anecdote et serait plus à même de la relier ou non à ce fameux Nogaret qui l’exaspérait tant. Mais hélas, l’interrogatoire tourna court quand, agité de peur et de bêtise, le malandrin se transperça lui-même la gorge sur la lame de l’écossais. Retirant sa lame du corps gargouillant qui finit par s’écrouler, sans vie, comme un tas de chiffons sales, Charlie croisa le regard de Malpertuis et tous deux purent se mettre d’accord sur le fait qu’ils ne prenaient nul plaisir à voir une âme quitter ce monde. Une raison de plus de se sentir proche du français, dans un monde où la brutalité et la violence gratuite étaient par trop coutumières au goût de Charlie. A croire que, malheureusement, ces choses là n’étaient jamais éloignées de la liberté…

Calant son livre sous le bras, Charlie sortir un chiffon de sa tunique et entreprit de nettoyer sa lame tandis que Nogaret lui faisait ses adieux. Pour l’instant du moins, car comme Malpertuis le disait, Charlie comptait bien le croiser à nouveau. Et de préférence autour d’une bonne chopine et au sec plutôt que détrempés aux pieds d’une église en ruines avec une bande marauds sur le dos. Il sourit franchement, répondant à Malpertuis :

« Le plaisir fut partagé, cher maître. Cette petite anicroche mise à part, j’ai été ravi de cet entretien. Si on m’avait dit ce matin qu’en venait rêvasser parmi les vieilles pierres, je me ferais un ami, je ne l’aurais pas cru. Et pourtant nous voilà, à croire que la fortune n’est pas responsable que de mauvaises surprises ! Et rien ne ressert plus les liens qu’un bon combat. C’est dans ces moments là que l’on sait sur qui l’on peut compter. Et à partir de ce jour, je n’aurai nul souci à déclarer à quiconque que je confierais ma vie à maître Malpertuis-des-lumières, foi de Charlie Withmore ! »

Et rengainant son épée, Charlie serra chaleureusement la main de son camarade, avant d’ajouter :

« Nous nous reverrons assurément, l’ami ! Autour d’une bonne chopine à la Jambe de bois, ou pour toutes les aventures que le destin jugera bon de précipiter sur notre chemin ! En venant ici aujourd’hui, je pensais ne trouver que ce vieux livre ; et j’ai déniché bien mieux : un camarade ! Mais je ne veux vous retenir plus longtemps. Et il en est des amphitritons comme des princiers : le devoir nous appelle sur nos navires respectifs. Alors à bientôt, cher maître, cher ami ! »

Et Charlie aussi, tandis que leurs chemins se séparaient pour aujourd’hui, ressentit ce petit pincement au cœur, de celui qu’on avait lorsqu’on quittait une âme avec laquelle on s’entendait mieux qu’on ne l’aurait jamais cru. Car un ami était rare dans une vie de pirate, et un tel sentiment se devait de vous toucher ; d’autant, Charlie le savait maintenant, que ce ne serait certainement pas la dernière fois que se croiseront les chemins de Malpertuis-des-lumières et Charlie Withmore !


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[HRP: voilà, sujet terminé, si je ne m'abuse!^^]
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