Cap à l'Ouest !
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 Obscurité ( PV : Scarlett Calypso Lewis )

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Evan Lenoir

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MessageSujet: Obscurité ( PV : Scarlett Calypso Lewis )   Obscurité ( PV : Scarlett Calypso Lewis ) EmptyDim 29 Aoû - 11:47

Tortuga de Mar la nuit est l'âbime des vivants. Les rues poisseuses durant la journée se font plus poisseuses encore : elles se remplissent d'ivrognes et de rhum. On ne peut plus marcher sur un pavé désenclavé sans qu'il ne soit couvert de bière, de pisse ou de sang. La couleur originelle de la pierre a depuis longtemps disparu. A présent le sol est noir, et la couche d'ordure est tellement épaisse que plus rien ne s'infiltre entre les dalles. Alors de petits ruisseaux se forment le long des façades décrépies, le plus souvent rouges ou bruns marrons, et leurs vapeurs pestilentielles embrûment l'air déjà vicié. Pour qui s'aventure, comme moi, au petit matin dans les ruelles de Tortuga, l'enfer semble avoir pris sa place sur Terre.

Chaque jour je suis un peu plus dégouté par cette ville. Elle me fait penser aux quartiers mals famés de Paris - avec en plus l'odeur de la vase. Je donnerais n'importe quoi pour m'en échapper. Où est ce capitaine que je cherche depuis des semaines? J'ai refusé toutes les embauches que l'on m'a proposées ; trop mal payé, trop louche, trop sale, trop barbare... Je rêve de devenir pirate et non plus mercenaire. J'attend un navire, un vrai, un capitaine! J'aspire à l'aventure et non pas aux pillages aveugles! Je suis un excellent marin et je le sais, sans aucune fausse modestie. On ne cherche pas Evan LeNoir. On sait à quoi s'en tenir, on sait qu'il a horreur du sang, mais qu'il sait le verser sans remord. Et l'on sait aussi qu'il ne restera pas un simple équipier de bord ; le Borgne sera capitaine, je me le suis juré. Je trouverai ce trésor... La petite clé à mon cou est une promesse. En attendant, je dois trouver un navire digne de ce nom.

Mais ce matin, l'offre ne se presse par à la porte. Je suis sobre, comme d'habitude. Peut-être la seule haleine pure respirant à Tortuga ce matin. Ce n'est le cas de tous ces corps que j'enjambe... Puis soudainement, j'ai le souflle coupé. Snas trop savoir comment ma visage est plaqué contre un mur et la pierre rugueuse y fait perler une goutte de sang.

"Ta bourse ou ta vie chien! Et plus vite que ça!"

Je manque me retourner et vômir tant le souffle qui me crache cette insanité est puant de bière. Il tient mes deux mains serrées dans son poing énorme et flasque, et de l'autre il appuie un couteau émoussé sous ma gorge. Avec un rictus je me dis que ce sera plus difficile à couper... ça fera plus mal. Avec un soupir lassé, je pose un pied bien à plat sur le mur et donne un puissant coup de jarret pour me propulser en arrière. Surpris, l'autre s'écroule en grognant sous mon poids et sans lui laisser le temps de réagir, je libère mes poignets de son étreinte brisée et me retrouver face à lui.

"La banque ne prète pas." ai-je calmement asséné. Puis j'ai cherché des yeux le couteau que je prévoyais de lui enfoncer dans la main. Avec un juron, j'ai soudain réalisé qu'il n'était plus à terre, là où je l'avais vu choir en tombant. Tout en maintenant ma prise sur l'ivrogne, j'ai levé les yeux.

Et ces derniers ont accroché le plus solide, le plus splendide et le plus féroce visage qu'il m'ait été donné de voir.
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Scarlett C. Lewis

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MessageSujet: Re: Obscurité ( PV : Scarlett Calypso Lewis )   Obscurité ( PV : Scarlett Calypso Lewis ) EmptyLun 30 Aoû - 8:22

    Les ruelles de Tortuga de Mar de nuit, avec leur odeur rance d’alcool fort et de sueur, invitaient toujours à une débauche agréable pour oublier le glacial quotidien d’un Océan exigent avec ceux qui le chevauchaient. Ce n’était que lumière chaude à travers des vitres encrassées, musique lointaine hésitante ou entraînante, selon le taux d’alcool ingéré par les musiciens, sons étouffés du verre cogné contre le verre ou brisé contre un carrelage endurci.
    Les ruelles de Tortuga, quelle que fût l’heure, accueillait toujours les plus sujets à l’alcool, les plus effondrés, ce qui ne tenaient plus debout et qu’on avait jetés dehors pour faire de la place. Rires gras. Paroles dépourvues de sens. Des corps affaissés et de vieilles loques couvraient le pavé, champ de mine dans la quasi-obscurité du lieu.

    Cette ambiance ne manquait jamais d’amuser la jeune capitaine, sorte d’introduction à une nuit de beuveries et de jeux divers, qu’elle appréciait après quelques semaines de navigation. Jamais… Ou presque jamais. Aujourd’hui, c’était différent. Arrivée à Tortuga trop tard pour prendre part à la fête, vu la quantité d’alcool déjà versée dans chaque gosier, elle s’était assise quelque part, sans regarder autour d’elle, étourdie par la fatigue qui l’envahissait, puisqu’elle n’avait pas encore bu à une bouteille réconfortante. C’est là qu’il avait choisi d’agir. Un vulgaire voleur des grands chemins, passé à côté d’elle, arrachant à sa ceinture une bourse contenant assez d’or pour une soirée honorable. Les orgueilleux ne sont pas des êtres résignés par nature. On entendit le raclement des pieds de sa chaise sur le parquet, malgré la musique et les cris. Et qui n’était pas assez aviné la vit sortir à grands pas, les talons de ses bottines claquant fermement, le menton haut, la main sur un pistolet. Furieuse, elle allait corriger ce petit insolent qui s’était permis de lui voler quelque chose, qui s’était permis de croire qu’elle était assez insignifiante pour accepter sans se débattre la punition aléatoire. La porte de la taverne claqua. Le froid de la nuit fit frémir la jeune femme, qui pourtant accéléra l’allure, maudissant les fameux ivrognes que nous avons pris le soin de décrire plus haut. Ils ralentissaient sa progression vers l'homme faussement victorieux, qui louvoyait dans la rue, lent comme un ivrogne. Le petit imbécile l'avait déjà oubliée, il s'imaginait qu'une petite femme comme elle mendierait à quelque homme une pièce pour se payer une bouteille d'alcool, résignée et impuissante. Rien ne pouvait plus engraisser la colère de Scarlett. On la prenait pour une petite femme faible et soumise. Elle dégaina la lourde arme qui pendait sur sa cuisse, s'approchant sans discrétion de l'homme ivre - au moins de bonheur.

    Mais un évènement la força à se cacher dans l'ombre, ce qui était une tâche aisée au milieu de tous ces corps plus ou moins immobiles. Il s'était arrêté, collé à un autre homme, qui avait l'aspect du gringalet le plus simplet. Encore un qui perdrait sa bourse ce soir... Dans l'éclat de la lune ou celui des chandelles filtrant des fenêtres de la taverne la plus proche, elle perçut le reflet de la lumière dans l'acier. Il menaçait le jeune homme avec un simple couteau, qu'elle se ferait un plaisir de lui planter dans le cœur, bien que cela ferait sans doute un peu trop théâtral... Toute à ces charmantes réflexions, la jeune femme observa l'inconnu plongé dans l'ombre se débattre, se dégager. Intéressée, soudain, par l'étrange agilité calculée de l'agressé devenu agresseur, elle s'approcha, invisible à leurs yeux, dans l'ombre d'un mur de pierres. Le voleur lâcha prise, tandis que Scarlett se baissait, ramassant le poignard, tombé à ses pieds. Il lança une phrase non moins théâtrale que ses dernières réflexions, toisant son ennemi avec un mépris calme qui ne manqua pas de la séduire. Qui était donc cet inconnu, qui malgré une visible aptitude au combat, ne payait pas de mine ? Il sembla chercher le couteau, portant un instant son visage à la faible lumière qui tremblotait dans la ruelle - chandelle solitaire ?- . Elle se le rappela aussitôt, son jeune visage déjà marqué par un bandeau de borgne et ses traits contrariés traïssant une maturité certaine, une amertume à peine dissimulée. Il lâcha un juron, toujours à la recherche du poignard. Une mauvaise lame, mal affutée, mal fixée à sa vulgaire poignée de bois non traité. Le jeune homme qui le cherchait, elle se le rappelait, maintenant, écumait les tavernes à la recherche d'une offre d'emploi. Elle l'avait vu partir au moment où elle entrait dans le tripot, soupirant, tandis qu'un capitaine aviné le disait difficile. On l'avait vite oublié, revenant à la fête. Il était donc l'un de ces forbans qui refusaient l'offre de capitaines, cherchant on se sait quoi, réfléchissant dans quel équipage crasseux et misérable s'embarquer pour la fortune illégale. Il était ce genre de jeunes - ou plus vieux - arrogants que l'argent n'intéressait souvent pas, et qui se mettaient en quête d'aventure et de liberté... Un vague sourire qu'on aurait plus tout aussi bien qualifier de méprisant que de compatissant, elle s'avança dans la ruelle.

    Sans se méfier de l'air illuminé du jeune homme, elle pointa le pistolet en direction de l'homme, tira dans la tempe avec précision. Le corps fut secoué de soubresauts, un gargouillement s'en échappa. Sans y prêter la moindre attention, elle tira de l'une des poches de l'impudent sa bourse, ainsi que trois autres petits sacs de cuir, qu'elle glissa dans le premier. L'attachant à son ceinturon, elle se releva et se tourna vers le jeune pirate resté à la même place. Elle lui tendit le couteau, le tenant par la lame, avec un air impénétrable. Quelle serait sa réaction face à la jeune femme qui venait de lui voler sa victime ?

- Vous avez perdu ça, il me semble.

    La phrase, prononcé d'un ton nonchalant, assez haut pour couvrir tous les sons étouffés du lieu, assez claire pour prouver qu'elle était sobre, aurait sans doute autant d'effet que le reste de son apparition. Un léger sourire en coin apparut sur son visage, sans raison particulière et donc le sens serait bien dur à déchiffrer pour un inconnu. Telle était Scarlett, et sa façon d'aborder les inconnus avait toujours un air de défi provoquant.
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MessageSujet: Re: Obscurité ( PV : Scarlett Calypso Lewis )   Obscurité ( PV : Scarlett Calypso Lewis ) EmptyMar 31 Aoû - 14:17

Ces traits si durs et ambrés, ces yeux de tigresse féroce, ce corps souple et vivace, cette bouche amère, ces mains froides et impitoyables... Toutes ces caractéristiques imporbables réunies en un seul être de femme, en un seul esprit indomptable... Le rêve de dyzaines d'hommes, la jalousie de temps de femmes... Comment croire qu'il était là, devant moi, ce mythe de la piraterie? Scarlett Calypso Lewis, celle que je considérais comme la plus grande capitaine de son époque. Aussi tempétueuse que la déesse des mers dont elle portait le nom! J'avais d'abord cru à une légende quand on m'avait parlé d'elle... et maintenant j'étais bien forcé de recconaitre la vérité : elle existait bel et bien. J'avais cru que mon imagination décuplée de parisien romantique avait exagéré l'impression que j'en avais : mais il n'en était rien. Elle était réellement aussi impressionante que l'on me l'avait décrite - le plus souvent avec des yeux éperdus d'amoureux. Je parvenais maintenant à comprendre ces hommes : elle était d'une véritable beauté sauvage!

Je ne suis pas ému quand le corps de l'ivrogne sous moi se mit à tressauter comme un goret : il méritait sa mort. Quand il cessa de bouger un filet de sang se mit à couler au coins de sa bouche tordue sur un dernier rictus aviné. Ses yeux devinrent ternes, vides de toute expression. Il mourut comme le chien qu'il était, étendu sur un trottoir crasseux et puant comme sa chemise. La mort était si courante à Tortuga... Une sorte de vieille amie... Pourant au plus possible, j'évitais de lui servir d'instrument. C'était, à mon sens, ce qui distinguait la bête de l'être humain : inutile de donner aveuglément la mort quand l'intelligence humaine permettait mieux... Comme la torture, lente et douloureuse.

Sans un regard pour le cadavre je me suis relevé face à Lewis. Elle tenait le couteau par la lame, à ma portée et un sourire en coin sur les lèvres. Provocante, évidemment... Je ne me laisserais pas prendre au jeu ; moi aussi, j'avais l'habitude de tester ainsi mes interlocuteurs. Mais avec elle, aucun masque n'était nécessaire. Il fallait jouer franc jeu. J'ai soupiré un bon coup et levé la main pour dédaigner la lame émoussée. J'avais à présent un petit sourire amusé moi aussi, un peu comme pour une réception mondaine. Mais ma voix calme ne tentait pas de cacher l'accent cruel qui teintait cette phrase :

"Non merci Mlle Lewis, c'est inutile. Il aurait fallut lui couper la main ou les couilles, ça l'aurait fait souffrir bien plus longtemps. Maintenant qui sait où il cuve son vin?"

J'aurais pu ajouter que pour moi, la main était la punition du voleur, les couilles celles du violeur : cet homme en était un, que je n'avais reconnu que tardivement. Mais je ne pensais pas que ce genre de jugement soit du gout de Lewis. Elle ne s'enbarrassait pas de se genre de détails. Une balle dans la tempe réglait plus surement les choses, de son avis. A chacun son plaisir! Cela ne l'empechait pas d'être une des plus belles femmes que j'ai jamais vu. A sa manière, bien plus distinguée que bien des parisiennes! Et quel caractère! Mais attention à la tigresse : ellel mordait. Ce qui était bien moins réjouissant pour un quelconque prétendant ; fort heureusement, je ne me trouvais pas parmis cette catégorie. Mais pourquoi se priver du coup d'oeil quand un beau navire passe devant vous?
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MessageSujet: Re: Obscurité ( PV : Scarlett Calypso Lewis )   Obscurité ( PV : Scarlett Calypso Lewis ) EmptyMer 1 Sep - 10:18

    La pénombre le rue était de plus en plus épaisse, pourtant l'apparition de la jeune femme avait provoqué chez l'inconnu un haussement de sourcils surpris bien familier. Il faut dire que son irruption dans la scène avait de quoi surprendre. Elle se dressait face à lui, à terre, imposante sous l'éclat terne du dernier croissant de l'astre argenté. Elle était fière, égoïste, abattant sans une hésitation une proie qui n'était plus la sienne, surgissant de nulle part, son pistolet à la main. Ses yeux félins parcoururent furtivement le gringalet encore posté à la hauteur du cadavre du voleur. Il était frêle, on ne pouvait pas penser le contraire, pourtant sa manière de se battre avait quelque chose d'impressionnant, de presque animal. Ce jeune homme fin comme un clou était une brute à sa manière et son regard d'acier l'affirmait aussi bien que le faisaient ses gestes.

    Après le coup de feu, il se releva rapidement. Pas bien campé sur ses deux longues jambes en allumettes, il avait l'allure d'un rafiot léger secoué par des vagues trop fortes, alors que ses yeux (ou plutôt son seul œil valide) trahissaient toujours cette fougue et cette vigueur qui semblaient faire de lui un être légèrement paradoxal et parfaitement redoutable. D'un geste, il lui fit comprendre qu'il refusait la lame. Son attitude, presque dédaigneuse, agaça Scarlett. Pour qui se prenait-il, le gamin encrassé par la ruelle, à la commander de la main comme l'aurait fait un duc quelconque envers une servante tirée à quatre épingles ? Son sourire en coin, rictus qui pouvait signifier qu'il se sentait trop intelligent pour entrer dans son jeu, appuya cette impression. Mais il semblait vouloir parler, le frêle être d'acier. Maîtrisant une colère grandissante, Scarlett, le menton haut, jeta le couteau au côté du cadavre, tandis qu'il ouvrait une bouche convaincue et très légèrement narquoise.

      - Non merci Mlle Lewis, c'est inutile. Il aurait fallut lui couper la main ou les couilles, ça l'aurait fait souffrir bien plus longtemps. Maintenant qui sait où il cuve son vin ?


    Mlle Lewis. Mlle Lewis. Le petit crétin, fort d'un pouvoir de torture qu'il n'avait pourtant plus, la connaissait. Étrange spectacle que ce personnage qui la reconnaissait d'un œil dans l'ombre de la nuit. Mais il semblait être poli, il semblait vouloir bien faire. Peut être espérait-il d'elle une approbation, ou même une réponse. Elle aurait pu lui planter ce fichu poignard dans l'épaule avant de partir à grandes enjambées, mais cette très légère humilité exprimé par ce "mademoiselle" et son nom qu'il avait pris la peine de prononcer, de se rappeler, bien camouflée par un reste de phrase qui se voulait sans doute féroce ou grossier, la convaincu de rester, de lui répondre. Ne serais-ce que pour préciser que oui, c'était elle, Scarlett Lewis, qui se dressait face à lui, et que ses méthodes de tortures lui importaient peu.

      - Oh, mais vous connaissez mon nom ? Nous sommes-nous déjà rencontrés quelque part ? Vous avez, je pense, une allure que j'aurais pu oublier.


    Commencer par la surprise, faussement exprimée par cette jolie voix soudain claire comme de l'eau de roche, suivie de cette réflexion parfaitement déplaisante à la signification claire : il n'était rien face à elle. Pleine de mépris face à l'attitude orgueilleuse du vagabond, elle l'écrasait doucereusement, à l'aide de phrases jouées sur un mode innocent et parfaitement blessant pour le moindre orgueilleux. Aucun besoin d'un couteau de basse qualité pour défier une personne, semblait-elle dire, fièrement campée sur ses jambes nues dans le froid de la nuit, un pan de sa jupe courte claquant sur sa peau devenue argentée dans la nuit. Sa voix, fière et forte, s'éleva une nouvelle fois au-dessus du fond sonore de la rue, chants d'ivrognes, gémissements de piétinés, cris d'excités.

      - A vrai dire, je n'ai pas de temps à consacrer aux voleurs ivre-morts. Une balle dans la tête suffit amplement comme correction, et je récupère ma bourse. Il a cru qu'une demoiselle le laisserait en paix avec son or, et il est mort, voilà tout. Inutile de perdre du temps avec ce genre de... personnes.


    Un ton méprisant, légèrement dégoûté. Oh, elle était bien au-dessus de la petite vengeance de celui qui aime voir souffrir, Scarlett. La mort de ce genre de porcs stupides nés pour voler, se trainer dans la misère et mourir sans ambition lui suffisait. Torturer un personnage si insignifiant, un élément du décor, n'avait pour elle pas le moindre attrait.
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MessageSujet: Re: Obscurité ( PV : Scarlett Calypso Lewis )   Obscurité ( PV : Scarlett Calypso Lewis ) EmptyJeu 2 Sep - 19:04

Une merveilleuse envie de rire me prit en voyant monter sa colère… Et oui « mademoiselle capitaine », je me permets de refuser ce couteau miteux… Voilà qui donnait le change : elle ne se prenait pas pour un vulgaire matelot de passage, la Lewis. Elle avait sa fierté, la vraie ! Celle qui fait peur, celle qui fait trembler les moins-que-rien ! Seulement voilà, deuxième volet de l’échange… Moi non plus, je n’étais pas un vulgaire forban. Prétendre que je n’avais aucune admiration pour ce long corps félin, ces yeux vivaces reflétant la lune cruelle, ces paroles aussi amères que chantantes, aurait été pur mensonge. Mais si elle voulait prendre l’ascendant d’emblée, elle allait être déçue.
- Oh, mais vous connaissez mon nom ? Nous sommes-nous déjà rencontrés quelque part ? Vous avez, je pense, une allure que j'aurais pu oublier.
Mon sourire s’étira de façon plus narquoise encore. J’avais eu raison, oh que oui… Quel personnage fascinant ! Dominer, dès l’entrée de jeu, dominer encore et toujours ! Typique d’un être qui avait toujours subit les préjugés de sa condition… une femme. Et qui en tant que telle avait dû toute sa vie se battre pour être reconnue. Alors quand elle avait affaire à un nouveau venu, il lui semblait nécessaire d’immédiatement faire comprendre que c’était elle, le maitre. Je la comprenais parfaitement. On la sentait décidée, mûre, prête à tout pour avoir le droit d’être ce qu’elle voulait être. Elle se battrait pour son statut bec et ongles, ne voulant plus vivre si ce n’était pirate. Elle était une véritable fille de la mer, née pour elle et luttant férocement pour s’y tailler sa part de richesse. Une âme passionnée, en somme.

Oh oui, j’aimais ça !

Mais moins le fait qu’elle s’élève en me rabaissant en retour. J’avais été second, même si le navire que j’occupais à ce titre n’était pas des plus glorieux. Et moi aussi, j’avais lutté pour ma place. Parti de rien, de la condition d’esclave, je m’étais fait une réputation dans le monde de la piraterie, même si mon nom n’était pas aussi reluisant que celui de bien des capitaines aventureux. Je n’étais pas vraiment blessé dans mon orgueil, mais plutôt lassé. Tous mes employeurs potentiels avaient eu la même attitude : celle de me considérer comme une pièce mineure, de moindre importance. Je n’aspirais qu’à être reconnu, rien de plus. Je voulais simplement trouver ma place dans la véritable piraterie, la grandissime boucanerie. Je savais en être capable, je pouvais m’y illustrer moi aussi ! Si Scarlett Calypso Lewis possédait bien le passé qu’on lui attribuait, alors un jour elle avait ressenti la même chose. Et si elle oubliait ses origines pour continuer à se faire méprisante, je n’avais rien à en attendre. Autant partir.

Je me suis donc relevé, pendant qu’elle continuait sa tirade.

- A vrai dire, je n'ai pas de temps à consacrer aux voleurs ivre-morts. Une balle dans la tête suffit amplement comme correction, et je récupère ma bourse. Il a cru qu'une demoiselle le laisserait en paix avec son or, et il est mort, voilà tout. Inutile de perdre du temps avec ce genre de... personnes.
Je me suis épousseté avec négligence, en bon ancien parisien que j’étais. Puis je me suis à mon tour avancé dans la pénombre. Mon unique œil la regardait d’en bas et reflétait avec froideur l’éclat pourtant ambré d’une chandelle, à la fenêtre voisine. Mon sourire s’évanouit pour lui répondre. Ma voix me ressemblait : mince et humble, mais tissée d’acier.

« Là n’est pas la question il me semble… Cet homme était un violeur et je ne suis personne pour décider de lui donner la mort en me constituant en tribunal. Je n’ai pas le droit de commandement des capitaines. En revanche j’aurais pu mettre fin à ses… chaleurs. »
Intentionnellement, je ne donnai toujours pas mon nom. Mon regard en disait assez sur mon sentiment – je ne me laisserais pas dominer, toute capitaine soit-elle.
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MessageSujet: Re: Obscurité ( PV : Scarlett Calypso Lewis )   Obscurité ( PV : Scarlett Calypso Lewis ) EmptyDim 12 Sep - 9:38

    Une personne intéressante a une caractéristique principale : Elle lutte, elle se débat. Elle ne se laisse pas soumettre par quelques mots orgueilleux. C'est ainsi qu'on détache ceux qui ont assez de cran pour aller loin, des autres qui seront toujours sous la coupe d'un plus puissant. Une personne intéressante n'est pas de ceux qui lèchent les bottes d'une jolie capitaine, une personne intéressante ne baisse pas la tête quand on lui fait un reproche. Une personne intéressante analyse, juge, expose sont point de vue et le défend.

    Et Evan était visiblement de la catégorie de ceux qui ont un mot à dire et ne se laisseraient pas porter par le courant sans ramer en sens inverse. Elle l'écrasait consciencieusement de ses mots choisis, de son ton de roc, de ses yeux froids comme les abysses et lui, souriait.
    Oh, ce n'était pas grand chose, et elle aurait dû s'énerver encore plus. Un sourire moqueur, s'étalant sur un visage inconnu, juste destiné à elle, était sensé la plonger dans une fureur pleine de conséquences. Et pourtant, elle décelait dans ce sourire et dans ce demi regard de borgne, autre chose. Un mélange subtil de volonté, d'une pointe d'orgueil, d'une légère contrariété. Traces de passé ? L'être, imperceptiblement amer, avait-il eu un vécu plus lourd qu'on ne le supposerait ? On n'en pouvait douter, même à première vue, c'était un fait, et ce regard de bête sauvage blessée ne pouvait que la conforter dans cette opinion. Il ne se laisserait plus dompter facilement. Que ferait-il, s'il se sentait à nouveau menacé ?

    Oh, Scarlett n'avait pas peur, elle avait appris à n'avoir que très rarement peur pour sa personne, ou du moins à ignorer cette peur-là. Elle observait juste cet inconnu qui se relevait, fier malgré sa stature bancale, légèrement menaçant malgré son seul œil visible. Elle le trouvait intéressant. Il avait la présence des bons matelots endurcis. Il avait la force des meneurs, l'air impartial des vieux loups de mer. Toute à ces réflexions, elle avait presque oublié ce sourire froid et narquois, avec lequel il la provoquait sans que pour une fois, elle y fisse attention.

    Faisant preuve d'une attitude des plus nonchalantes tandis qu'il s'époussetait, il faisait avec le cadavre de l'ivrogne à ses pieds un contraste assez amusant. Il prit le temps de l'écouter, sans émotion particulière. Il était à nouveau dans l'ombre, une bougie éclairant juste son œil luisant, très légèrement, juste pour lui donner un aspect plus incandescent encore. Il n'était pas spécialement beau, ni grand, ni fort, mais cette domination qu'ils se disputaient et qu'un instant il avait sur elle lui donna froid dans le dos, un frisson parcourant sa peau basanée. Il n'était pas qu'un simple garçon des rues, et cette erreur qu'elle avait faite en le jugeant ainsi, l'avait, semblait-il légèrement vexé. Pourtant, maintenant, une chose importante était faite : il savait qui elle était et ce qui adviendrait de sa vie fragile si il se méprenait sur la personne.

      - Là n’est pas la question il me semble… Cet homme était un violeur et je ne suis personne pour décider de lui donner la mort en me constituant en tribunal. Je n’ai pas le droit de commandement des capitaines. En revanche j’aurais pu mettre fin à ses… chaleurs.


    Ainsi il avait choisi d'être l'un de ces quelques sages qui remédient à un mal au lieu de tuer, prônant la justice avant tout. Il la regardait droit dans les yeux, elle soutint cet œil menaçant sans ciller. Et ne dit rien, tout d'abord. Non pas qu'elle fut prise de cours (ou du moins, qu'elle voulut l'avouer), mais elle contemplait avec un plaisir secret cette force dévastatrice qu'il canalisait en ne frappant que si c'était "juste". Il aurait pu devenir la terreur des pirates, accompagné de quelques gars de son acabit (en plus soumis, bien sûr), s'il ne réfrénait pas cette violence un peu trop grande pour être naturelle. Qu'avait donc vécu ce jeune homme pour devenir ce qu'il était, à savoir un vagabond coincé entre ses sentiments, doté d'un fort goût pour la justice, et d'une force qu'il se sentait obligé d'administrer ? Après tout, ce n'était pas son problème. Ce qui résultait des mystères de l'individu lui plaisait. Un pirate fort mais trop juste pour être un traître, un homme indomptable, mais assez intelligent pour la laisser prendre la décision de la mort d'un homme.

      - Vous êtes bien attaché à la justice, pour notre humble monde de pirates malhonnêtes. Je suppose que d'une certaine manière, c'est une vertu.


    La voix était calme, posée. On y percevait toujours une pointe d'orgueil inconscient qui faisait de Scarlett ce qu'elle était, mais le ton réellement hautain qu'elle lui avait montré s'atténuait, laissant place au seul charisme de la jeune femme capitaine. Aucun sourire n'aurait pu se lire sur son visage pour qui ne savait lire dans ses yeux au feu dévorant de volonté et d'une pointe de ce qui pourrait plus tard devenir de l'affection.

      - Mais je ne crois pas avoir entendu votre nom... Aurai-je le privilège de savoir qui vous êtes ?


    Bien sûr, cette dernière phrase fut prononcée avec la pointe d'ironie qui prouve qu'on ne change pas une personne si facilement. Elle était à nouveau dans son monde, jouait avec cette puissance qu'elle dégageait naturellement, sans pour autant prendre de haut l'inconnu, sur qui l'orgueil n'avait pas une prise suffisante. Mieux valait en faire un allié. Elle avait un projet, pour ce vagabond gringalet. Du moins, elle en aurait un s'il ne lui manquait plus de respect.
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MessageSujet: Re: Obscurité ( PV : Scarlett Calypso Lewis )   Obscurité ( PV : Scarlett Calypso Lewis ) EmptySam 9 Oct - 21:34

Après lui avoir opposé mon point de vue, j’en avais, soyons franc, un peu assez de cette discussion quasi éthique. Qu’elle veuille le tuer – et qu’elle l’ait fait – la regardait, que je ne le veuille point et m’en soit abstenu, me concernait. Au-delà, débattre d’une action de toute façon irréversible ne pouvait tourner qu’à un dialogue de sourd, en particulier si les deux parties possédaient assez de cran que pour défendre avec fermeté leur opinion. Dès l’instant où il apparaissait clairement que ni l’un ni l’autre ne changerait d’avis, c’était à la fois une perte de temps et de salive. Or, mes jours étaient précieux. Il me fallait un navire, coute que coute, et je me devais d’employer toute mon énergie à le trouver – plutôt que de débattre vainement du sens de la justice du pirate que j’étais.



D’autant plus que Scarlett Calypso Lewis ne serait sans doute pas à même de comprendre cette obstination à épargner la vie. Elle qui avait vécu toute sa vie en luttant, et souvent en tuant pour gagner sa place, ne pourrait concevoir à priori que l’on éprouve des regrets à prendre une vie… Or moi, j’en ressentais. Il y avait dans ce passé que je refoulais avec obstination une tâche, une nuit sombre et enivrée qui avait tourné au cauchemar en l’espace d’une chope de rhum… Il y avait un cadavre, que rien ne justifiait, retrouvé démantelé dans une ruelle de Tortuga. Dans les registres de la Compagnie des Indes que j’étais parvenu à me procurer à Port-Royal, on pouvait lire « Evan LeNoir, soupçonné de meurtre », et ça, c’était pire que tout. J’étais un tueur depuis mon accession au rang de second sur l’Ecumeuse. Et des forbans, des concurrents, des ennemis, j’en avais occis tant qu’il me fallait plus de mes deux mains pour les compter. Seulement « tueur » était acceptable. C’était mon métier, ma nécessité, ma défense ! Je tuais parce que j’étais pirate et que le sang était de l’or en fusion, qu’il fallait refroidir pour ensuite le fourrer dans ses coffres.

Mais un « meurtrier »…

Je n’avais eu aucune raison valable de tuer cet homme dans la nuit. Pas plus que je n’en aurais eu de liquider le violeur. Entre la mort passionnée donnée au combat et celle froidement assénée par pure cruauté, il y avait un pas que je refusais de franchir… une nouvelle fois. Lewis ne faisait pas cette distinction. Tuer, c’était une chose, entière, sans variante, qu’elle appliquait à la lettre et au sabre, parce que c’était sa vie. Elle n’aurait pu comprendre mon « sentimentalisme ». Moi, si je parlais de mort, je m’aventurais en terrain houleux.



Voilà sans doute pourquoi je préférais de loin la torture.



Ces réflexions faites, je n’avais plus qu’à partir, à chercher encore et toujours ce maudit navire qui ferait de moi un pirate reconnu. La sombre ruelle, après avoir reçu sa ration quotidienne de sang plus ou moins frais, avait retrouvé son immobilisme froid. Aucune ligne d’avenir ne m’apparaissait plus sur les parois de brique noircies. Et déjà, je m’apprêtais à tourner les talons. A repartit vers la douce chimère océanne…



- Vous êtes bien attaché à la justice, pour notre humble monde de pirates malhonnêtes. Je suppose que d'une certaine manière, c'est une vertu.



Ah, une vertu… Etrange mot sorti de sa bouche… Mais si elle voulait le reconnaitre comme tel, pourquoi pas ? Cela n’allait pas bouleverser mon existence…



- Mais je ne crois pas avoir entendu votre nom... Aurai-je le privilège de savoir qui vous êtes ?



Là, en revanche, je me suis arrêté. Enfin, j’ai stoppé net mon intention de partir, puisque mes pieds n’avaient point encore eu le temps du décoller du sol. Si elle demandait mon nom, cela devenait franchement plus intéressant. Car malgré nos divergences de point de vue sur la mort, même si j’avais l’envie de partir, j’admirais la capitaine qui se tenait en face de moi et croisait verbalement le fer avec mon insolence. Manière pour moi également de la tester. Ce que je recherchais, je l’ai déjà mentionné, était la personne qui me reconnaitrait pour ce que j’étais et mesurait ma valeur à son juste niveau. Si Lewis avait été comme tous les autres, elle aurait simplement suspendu nette la conversation et serait retournée fouetter d’autres chats – après tout, quel capitaine équilibré aurait du temps à perdre avec un borgne de basse classe de nos jours à Tortuga ? Mais elle ne l’avait pas fait. Elle prenait le temps de rester dans cette ruelle puante et me demandait même mon nom… Si elle n’avait pas réussi à flairer ma vrai personne derrière le corps de l’adolescent, la grande Scarlett Calypso Lewis n’aurait pas pris cette peine. Et ça, ça valait bien d’affronter tous les débats éthiques du monde.



Alors, je suis resté. Et dès cet instant, sans le savoir, j’ai scellé mon futur de façon irréversible, car seule la capitaine Lewis avait le don ne transformer ma vie en ce qu’elle allait désormais devenir. J’ignorais encore tout du chemin que je venais de prendre en restant… Et je n’allais pas le regretter. Aujourd’hui, en regardant loin en arrière et en contemplant le résultat de l’aventure, je peux le dire pleinement. Mais à l’époque, je n’étais encore que…



- Evan LeNoir, français d’origine et pirate de profession. Je recherche un navire ayant du mérite pour m’embarquer.
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MessageSujet: Re: Obscurité ( PV : Scarlett Calypso Lewis )   Obscurité ( PV : Scarlett Calypso Lewis ) EmptyDim 17 Oct - 9:10

    Le visage sombre était devenu méprisant et désintéressé. Peu importe, semblait dire le rictus de la fine bouche étirée, éclairée par un coin de chandelle. Aucun de nous deux n'a vraiment raison, n'est-ce pas ? C'était aussi évident que la basse qualité des chants pâteux des ivrognes par terre autour d'eux : On a jamais vraiment entièrement raison quand on est un pirate, qui torture pour rester libre, qui tue pour manger le soir. Pirates. Ils n'étaient finalement qu'une bande de marginaux, maintenus ensembles par une haine solide de la société. Rattachés par de la haine. Peu importent la morale sur la mort et la torture, Miss Lewis. Nous sommes tous de futurs pendus.

    Cette impression qu'il dégageait, haut mépris des autres, de la raison, et un peu de sa propre condition, disparut instantanément quand elle eu la bonne idée de lui demander son nom. On a beau dire ce qu'on veut, se faire flatter par un capitaine n'a jamais rien de déplaisant. Ce premier maigre signe de reconnaissance de la part de Scarlett sembla faire changer d'avis notre illustre borgne inconnu, qui planta à nouveau son œil à la flamme ravivée dans le sien pour se présenter.

      - Evan LeNoir, français d’origine et pirate de profession. Je recherche un navire ayant du mérite pour m’embarquer, dit-il, soudain droit comme un piquet. Soudain un peu plus grand et engageant.

    Evan LeNoir. Le nom ne lui était pas inconnu. Elle avait vaguement entendu, sûrement de la bouche de ce pot de colle de Séraphin, le nom d'Evan LeNoir, ainsi que cette histoire de duel féroce, qui lui aurait fait perdre un œil et gagner du grade. Jolie histoire, qui, si l'on admettait qu'elle fût vraie, donnait une certaine valeur à l'individu. Mais il était à terre, sans navire et donc sans avenir, et pourtant, il se montrait exigeant. Ceci, nouvel élément étrange à ajouter au portrait, ajoutait à l'estime que, peut être, un jour, Scarlett lui porterait. Pour l'instant, il s'agissait encore de curiosité, et d'une légère soif de provocation. Si elle pourrait l'embaucher ? L'idée lui plaisait. Il savait visiblement se défendre, que ce soit avec ses poings ou avec des mots. Il était fier et exigeant, et semblait ne pas la prendre pour une fille de joie parvenue. Mais elle ne lui proposerait rien tout de suite, il était encore trop tôt. Une personne orgueilleuse n'accorde que rarement sa confiance au premier venu.

      - Du mérite ? Et quel genre de mérite peut avoir un navire, pour vous, monsieur LeNoir ?

    La voix n'était plus spécialement méprisante, juste curieuse, amusée. Il la faisait sourire, ce petit matelot, qui, malgré son manque de certitudes sur son avenir, gardait assez de fierté pour exiger le meilleur.


[C'est très court, mais je manque d'idées... ><]
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MessageSujet: Re: Obscurité ( PV : Scarlett Calypso Lewis )   Obscurité ( PV : Scarlett Calypso Lewis ) EmptySam 13 Nov - 15:23

( Pas de soucis, tu me laisses largement assez de champ de réponse :-) )

L'échange avait basculé de poids - du colloque philosophico-éthique, on était passé à une sorte d'entretien d'embauche. Cette jeune capitaine me plaisait de plus en plus, si fière, un soupçon arrogante, mais si entreprenante et sûre d'elle-même! Une main de fer dans un gant de femme. Elle savait guider ses hommes et leur inspirer confiance. Nul besoin de la voir à l'oeuvre pour le comprendre. Sa beauté - car recconnaissons tout de même qu'elle avait tout pour elle, la Lewis - pouvait être son unique faiblesse : on pouvait la croire frêle et si jolie, si facile à attendrir et à duper. Grave erreur! Elle regorgeait de férocité et de hargne. J'osais de plus en plus espérer que l'or n'était pas tout à ses yeux, qu'elle naviguait plus par amour de la liberté que par une banale cupidité. Sans rire, elle avait de la descente : le rhum était un compagnon coutumier sans doute, si ce que racontait Tortuga était vrai. Qu'importe! Elle ceuillait sans attendre les fruits de son succès : et de ce dernier, elle en avait. Beaucoup pour une femme si jeune. Peut-être trop même. Mais quel tremplin elle serait! Si la chance décidait de la suivre quelques années encore, de pillage en brigandage, je gagnerais rapidement de quoi monter ma propre entreprise. Le Prince des tempêtes ne serait qu'une étape.

Et je voulais la gagner!

    - Du mérite ? Et quel genre de mérite peut avoir un navire, pour vous, monsieur LeNoir ?




Le sourire ravi d'auparavant revint étirer ma bouche mince. Question délectable! En bon français que j'étais, je possédait à mon arc une corde autre que celle du tranchant d'un sabre d'abordage. Ma langue. J'adorais parler, philosopher, exprimer, faire des vers, de la prose et de la poésie! J'étais bien le confrère de ce cher Nogaret - enfin, du pseudo-Nogaret, mais passons ce détails. En somme, la parole était ma seconde arme favorite, argument affuté que ma soeur n'avait jamais pu supporté : j'avais toujours le dernier mot. Qu'il s'agisse de convaincre ma mère ou le capitaine d'un navire marchand, d'échapper au juge ou aux anglais, bien souvent les mots m'avaient été plus salutaires que mes poings. Avec eux, j'avais gagné mes plus grands combats. Et après ma salutaire éclunéation, c'étaient encore eux qui avaient finalisé mon ascension au rang de second. Aujourd'hui, ils allaient m'offrir - du moins je l'espérais - un nouveau chapitre de mon histoire.

Alors, j'ai parlé.

- Je ne suis pas devenu pirate par nécessité Mlle Lewis. Je me suis embarqué sur un navire marchand il y a maintenant plus d'un an pour soulager financièrement ma soeur. Nous n'avons plus de parents depuis trois ans et elle ne pouvait plus pourvoir à nos deux besoins, alors j'ai suivi la voie des mers, parce que c'était la seule que je connaissais vraiment. Quand le navire a été pris d'assaut par des pirates, j'ai été fait prisonnier et réduit à l'état d'esclave. Le capitaine était tirranique et son second m'obligeait aux pires bassesses. Pourtant, en un sens je n'avais jamais autant aimé la liberté : celle que ces hommes buvaient à plus soif à longueur de journée et dont ils me privaient. J'enviais leur position de marins libres, fiers et conquérants, et je me suis juré de devenir comme eux.

Il y eut une pose dans mon discours. Je revoyais en pensée les hommes suant de l'Ecumeuse se précipiter d'abordage en abordage, tuant et ravageant toute vie se trouvant à leur portée. Les mains remplies d'or et de sang.

- Je n'aimais pas leur façon de faire malgré tout. Il ne me paraissait pas juste de tuer une victime déjà mise à terre. Et l'or dont ils se remplissaient les poches était sali à mes yeux. Pourtant, cette pure soif de liberté qui les animait avait quelque chose de si fascinant et tentant! J'ai voulu gagner la mienne. Et un jour, j'y suis parvenu en me débarassant du second espagnol. Ca m'a couté un oeil, mais au moins, j'ai gagné la recconnaissance des autres. Et j'ai si bien su défendre que ma cause que le capitaine a fini par me nommer second après quelques semaines!

A cet instant, je ne pouvais cacher ma fierté - et je ne m'en cachais pas. En quelques semaines à peine, j'avais prouvé au reste de l'équipage que j'étais à la fois un marin accompli et un homme de confiance, qui plusieurs fois avait su prendre les bonnes décisions dans les moments critiques de pépin ou d'assaut délicat. Mes compagnons s'étaient rapidement raliés autour de moi, parce que je prenais toujours la décision juste, qui agréait tout le monde et augmentait significativement l'efficacité de nos attaques. Je répugnais toujours autant à tuer, mais ils ne m'en tenaient pas rigueur, au contraire : ils appréciaient que j'aide à épargner les leurs. Alors, en voyant la miraculeuse adhésion qui rêgnait soudain au sein de son navire, le capitaine m'avait convoqué dans ma cabine, et j'avais reçu mon nouveau poste.

- Pour autant, je n'étais pas entièrement satisfait. Ils reconnaissaient mes qualités et j'avais acquis un poste honorable, mais leur façon d'agir me laisser toujours sur ma faim. Les pillages aveugles et les tueries noyées dans le sang et le rhum, les accostages juste bons à fréquenter les putains et les tavernes, cette brutalité hargeuse et dénuée de réflexion... J'aspirais à autre chose. Ce navire était certe pirate, mais en fin de compte, il n'avait aucune liberté. Les hommes étaient pris dans le tourbillon de luxure et de beuveries que payait leur or rouge, et en somme, ils ne pouvaient plus vivre que pour cela : leur déchéance. Moi, j'avais soif d'aventure, de découverte, d'exploits, de trésors et de renommée! Loin, très loin de cette vie de pirate moyen qu'ils menaient. Alors, j'ai quitté mon poste pour chercher mieux. Pour m'embarquer à bord d'un navire véritablement libre, un de ceux dont le nom fait trembler les mers et que la compagnie des Indes craint plus qu'elle ne recherche! Un équipage de pirates fiers et non de brutes ivrognes! Un navire comme le vôtre, Mlle Lewis!

Est-t-il besoin de décrire à quel point mes yeux brillaient et ma vois s'emportait à l'énoncé de ce rêve? J'étais un passionné, furieusement épris de ma liberté! Et surtout, je connaissais pas ma valeur. Ce que je disais pas, ce qu'il aurait été imprudent de dévoiler, c'était que j'aspirais, moi, à être totalement libre, à être mon propre maitre, à devenir capitaine! Cela devrait attendre. Pour l'heure, j'attendais la réaction de Lewis.
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MessageSujet: Re: Obscurité ( PV : Scarlett Calypso Lewis )   Obscurité ( PV : Scarlett Calypso Lewis ) EmptyLun 29 Nov - 10:23

    Un nouveau sourire -celui-ci, plus sincère- vint étirer les lèvres et le visage émacié du jeune homme. Sa question aux allures à peine dissimulées d'entretien d'embauche ne semblait pas l'effrayer et c'est avec un plaisir non feint qu'il ouvrit la bouche et parla d'une voix claire. Il lui raconta sans pudeur une histoire déjà bien enjolivée par les ivrognes qui croisaient son air froidement méprisant adressé à qui le hélait. Il parla d'une sœur lointaine, une légère émotion dans l'œil. Éclat furtif, Scarlett le devina sans y faire attention. La subtilité n'était pas chez elle une priorité. Elle écouta son combat, sentant un mélange de fierté et de rancœur au souvenir des tortionnaires qui devinrent ses amis par peur de la même remontrance que celle accordée au mastodonte qu'avait été sa première victime. Elle écouta sa découverte d'une liberté féroce et meurtrière dans laquelle elle avait été élevée, enfant d'un monde sanguinaire qu'elle avait aimé autant qu'on le puisse. Elle écouta son incompréhension devant la violence, son ivresse devant l'infini océan, sa fierté d'être devenu un marin considéré, parti de rien. La liberté n'est belle que si quelqu'un peut vous l'envier ou l'apprécier avec vous. Il raconta avec ferveur la quête d'une liberté digne qu'un forban de base ne lui offrirait pas. Un soupçon de satisfaction envahit la pirate, tandis que sa considération pour le Borgne grandissait. Il n'était pas qu'un simple gamin recraché par l'océan en quête d'une fortune blanche et propre, de reconnaissance et de gloire éternelles. Il était aguerri. Ses mains aussi avaient été tâchées de sang, même s'il tentait de l'oublier. Il savait apprécier la reconnaissance de son mérite, mais son seul véritable but était la liberté. Voilà un point commun entre deux. Il n'était pas un utopique chercheur d'une gloire universelle que, misérables hors-la-loi, ils ne connaissaient qu'une minute avant que la trappe ne s'ouvre sous eux et que le nœud ne serre leur gorge.

    Il raconta, plus grave, la vanité et la contradiction des pirates, souvent de simples gueux incapables de se retenir de consommer immédiatement ce qu'ils gagnaient au prix de morts innombrables. Elle aussi, était comme ça, le plus souvent, mais nous nourrissait pas l'espoir insensé de devenir riche ainsi. Elle cherchait juste la liberté. Un peu comme les autres, elle s'imaginait à part par cette quête obsédante de la liberté et par orgueil. Certes, c'était sans doute chez elle cette fierté qui faisait toute la différence. Elle ne se réduirait pas à la misère des autres, parce qu'elle était quelqu'un, tout comme la plupart des utopiques qui constituaient son équipage. Tout comme le jeune homme enflammé devant elle.

    Il avait horreur, comme elle, de ce gouffre de déchéance où ils se jetaient, conscients de leur faiblesse qui les empêcherait de remonter. Seuls les plus forts pouvait espérer se hisser fièrement hors de l'abîme. Des gens comme elle et lui.

    La fin de sa tirade la fit enfin sourire pleinement. Ce Lenoir savait sans doute ce qu'il faisait, en la cajolant si habilement de paroles admiratives et gratifiantes. Le jeune homme n'aurait sans doute pas pu mieux faire qu'en la disant hors du commun et en insistant sur ce qui faisait son caractère si exceptionnel. Oui, elle méritait bien qu'un pirate redouté quitte son équipage de bons à rien pour rejoindre la gloire du sien. Il semblait aussi accroché à ses ambitions qu'une huître sauvage à son rocher et aussi enflammé qu'un capitaine pirate en plein abordage. Cet homme lui plaisait. Il aurait vite fait ses preuves à bord, et ce qui lui restait de jeunesse ne se sentirait bientôt plus du tout. Évidemment, un homme si ambitieux pouvait constituer un risque, mais il serait assez comblé de richesses et de liberté pour ne pas trop protester, si tout allait bien (la période était plutôt bonne pour les abordages) et elle ne craignait pas la mutinerie, traitant son équipage avec justice, impartialité, et sans cruauté, menant ses hommes d'une main de fer, organisant et confiant à chacun une tâche comme un véritable intendant. Ces réflexions faites, elle lui jeta un regard indéchiffrable, et prit le temps de l'observer. Il reprenait son souffle, son œil dans les siens. Entre défi, ambition et une part de rêve enfantin qui ne manqua pas de lui plaire, il n'exprimait visiblement plus aucun insolence, ce qui était un point rassurant. Un sourire inconsciemment séduisant glissé sur les lèvres, elle lui tendit une main fine mais calleuse.

    - Vous me semblez être un marin sensé, monsieur Lenoir. J'espère voir mes attentes rapidement comblées. Vous pourrez embarquer dès ce soir comme matelot qualifié, j'en préviendrai mon second.

    Jetant un regard secrètement amusé au candidat satisfait, elle attendit sa réaction avec une pointe d'impatience, jamais réellement satisfaite de compliments et de remerciements. Oui, ce qu'elle avait accompli était exceptionnel, cela de faisait aucun doute.

    Son attention fut soudain détournée par la vue du sang qui ruisselait du cadavre à leurs pieds, baignant la semelle de ses larges bottes, poisseuses et dégoulinantes. L'homme abattu au milieu de la ruelle n'avait pas fière allure et tira un rictus de dégoût à la jeune femme. Plus soucieuse de l'état de ses chaussures que de l'image morbide qu'offrait la scène aux passants avinés, elle poussa légèrement du pied le corps de pantin désarticulé, sans le faire bouger, puis releva la tête vers son interlocuteur, ennuyée de devoir tâcher ses mains de sang un soir d'escale. La silhouette plongée dans l'obscurité semblait attendre, nonchalante, et elle ne put lui en vouloir de ne point l'aider à accomplir une tâche si inutile. Elle soupira donc, et, résignée, essuya ses bottes sur la chemise du mort, que le sang n'avait pas entièrement imbibée, avant de s'éloinger d'un bon mètre pour l'y attendre, décidée à poursuivre leur conversation, s'il avait autre chose à lui dire, un peu plus loin de cet élément salissant.

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MessageSujet: Re: Obscurité ( PV : Scarlett Calypso Lewis )   Obscurité ( PV : Scarlett Calypso Lewis ) EmptySam 11 Déc - 12:35

Elle écouta sans mot dire ma tirade, attentive et impénétrable. J’y mettais toute mon énergie et pesais avec soin chacun de mes mots, conscient de ne disposer que d’une seule chance. J’avais depuis longtemps décidé que je choisirais moi-même mon équipage, mais pour autant cela ne signifiait pas que l’on m’y accueillerait forcément à bras ouvert. J’étais bien conscient de mes capacités et de ma valeur, mais pas assez stupide que pour en être arrogant et imbu de ma personne. Tout était à relativiser : j’avais de la valeur, mais elle ne constituait pas une garantie en soi : j’aurais toujours à la prouver… ne fut-ce que pour la conserver. C’était donc sans prétention aucune que je dressais mon portrait. Le récit personnel avait toujours ses petits avantages : mieux qu’un simple exposé des qualités requises, il les ancrait dans le réel, et mon parcours donnait plus de crédibilité à mes atouts. Autre avantage, non-négligeable : je lui donnais d’emblée une marque de confiance, en lui livrant certains détails non-connus du grand public, j’exprimais mes ambitions profondes, du moins jusqu’à un certain point. Je lui donnais suffisamment d’éléments historiques pour lui montrer que mon passé n’était pas à dissimuler, mais retenait tout de même certains passages choisis : histoire de montrer, tout de même, que je n’étais pas un naïf, ne me jetais à l’eau sans rames et en somme, que je savais protéger mes intérêts. Parfois, cela pouvait aussi générer une émotion favorable : mais cet aspect-là était à mon sens trop personnel et rusé que pour y prendre une Lewis… Dans ces cas-là, une flatterie habilement placée, même flagrante, compensait idéalement la carence sentimentale. Mon cocktail servit, je n’avais qu’à en attendre l’effet – lequel dépendait toujours de l’auditeur… Qui était en l’occurrence plutôt charmant d’ailleurs.

Pendant un instant, il fut difficile d’estimer quel direction allait prendre la conversation. Lewis avait conservé son parfait masque d’impassibilité et où que j’eusse cherché, pas un seul infime battement de cil ne m’aurait livré une part des réflexions qui suivaient leur cours derrière ce joli front. Pour ma part, je reprenais mon souffle et conservais mon œil planté dans les siens. Tout aussi inexpressif, j’en profitais pour la détailler avec plus d’attention, à la faveur d’une bougie rallumée derrière une fenêtre. J’ai déjà signalé auparavant pourquoi je ne souhaitais plus la compagnie des femmes. Mais tout de même, je me devais d’admettre que celle-ci était difficile à ignorer. L’ovale du visage était parfait. Les sourcils étaient dessinés au pinceau fin, la bouche reflétait la lune comme du corail bleu. Et le regard était si droit, si fort, si fier ! A faire trembler le monde... C’était un petit bout de femme à la fois fin et menaçant, presque troublant et en tous les cas, surprenant. Son physique la reflétait bien, en somme.

Puis enfin, un sourire avenant vint étirer ses jolies lèvres.

- Vous me semblez être un marin sensé, monsieur Lenoir. J'espère voir mes attentes rapidement comblées. Vous pourrez embarquer dès ce soir comme matelot qualifié, j'en préviendrai mon second.



Sur ces mots, elle me tendit une main décidée, que je serrai avec chaleur, mais respect. Une expression souriante et satisfaite sur le visage, je savourais ma petite victoire : mes mots avaient touchés au but. Et dès ce soir, je coucherais à bord du Prince des Tempêtes ! Le plus dur resterait à faire, en l’occurrence prouver la pertinence de mon engagement à un second que l’on disait assez rébarbatif, mais… Au moins mon entrée était-elle assurée. Je ne pus retenir un profond soupir de soulagement. La fin de mon errance, enfin ! J’allais retrouver mon amante l’océan, le grincement des mâts, le chant du vent sur les flots et la saveur des abordages ! La terre ferme commençait à me rendre malade, et je ne désirais plus que la quitter. Je n’aurais pu espérer mieux : Lewis avait une réputation de capitaine sévère, mais juste. Elle me laisserait faire mes preuves et j’aurais ma part de butin, à condition d’être efficace. C’était une étape décisive dans mon ambition de capitaine : j’entrais dans un sphère supérieure, une nouveau palier d’où m’élancer vers l’avenir que j’avais décidé de me créer. Oui, une magnifique victoire…

Elle eut soudain une grimace de dégout en fixant ces bottes. Je laissai échapper un rire en me remémorant la présence du cadavre : au moins avais-je eu un témoin ! Quel public ! Il commençait véritablement à se noyer dans son sang, le pauvre. Lewis essuyait ses bottes sur lui, à présent. Après tout, qu’il se rende utile ! Mais j’approuvais l’intention : cela commençait à sentir assez mauvais. Sous la chaleur humide des tropiques, aucun mort ne reste bien longtemps entier. Ce qui était pratique pour les assassins, mais plutôt incommodant pour les autres. Je rejoignis donc ma nouvelle capitaine au bout de la ruelle, où elle s’était raisonnablement retirée en quête d’un meilleur confort tant olfactif que visuel. Une fois à sa hauteur, je la regardai avec un sourire autant destiné à la remercier qu’à lui prouver que je n’avais en rien perdu d’une pointe d’insolence… Car sans elle, je n’eusse plus été moi-même.

-Je n’aurai jamais assez de vous remercier… Mon capitaine. Mais si vous estimez comme moi que l’atmosphère de ce lieu tend à être irrespirable, je vous propose de nous retirer.

Restait à savoir où aller. Pour être honnête, je n’avais qu’un hâte : me retrouver à bord d’un navire et sentir le roulis des vagues sous mes pieds ! Mais il me fallait auparavant passer cherche mes maigres effets : quelques vêtements de rechange et souvenirs de Lou que j’avais prudemment laissé dans la chambre que l’on m’avait louée. Une bonne occasion de remercier Lewis de façon plus substantielle.

-Je dois aller récupérer mes effets à la Jambe de Bois. Si vous n’êtes pas pressée je vous y offrirais bien un verre – à moins que vous ne préfériez directement regagner le Prince.

A vrai dire, j’espérais un peu qu’elle choisisse la seconde proposition - je ne buvais presque jamais -, mais c’était une question de politesse, et j’avais été bien élevé – enfin, dans la mesure où j’étais devenu pirate. Ma pensée vint me conforter avec un insondable rictus de plaisir.

*Et pas n’importe lequel, mon petit borgne...*


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MessageSujet: Re: Obscurité ( PV : Scarlett Calypso Lewis )   Obscurité ( PV : Scarlett Calypso Lewis ) EmptyDim 9 Jan - 17:26

    Les ruelles de Tortuga sont toutes les mêmes. Toutes entremêlées ensemble, regorgeant de mystères et de misère. Toutes ont ce caractère de sauvagerie euphorique que seul un pauvre bougre libre et sale peut créer. Toutes plaisaient autant à Scarlett, malgré le rictus de dégoût qui plissait sa lèvre supérieure, dernier reste d'éducation ou simple signe d'orgueil fiché en travers de son joli visage de brute distinguée pour l'usage. Toutes donnaient l'envie d'être parcourues d'un pas léger, dans l'espoir de trouver quelque illuminé vous crachant au creux de l'oreille la piste d'un trésor oublié.

    Là où elle s'était postée pour attendre son nouveau matelot gisait un vagabond aviné affaissé sur une catin visiblement endormie, charmant duo emplissant la ruelle de ronflements mélodieux. Une fenêtre encrassée illuminait faiblement l'endroit, laissant deviner des pavés irréguliers, souvent manquants, de la boue et un vieux tricorne fatigué. Sur le dallage de fortune, ses pas claquèrent pour la rejoindre un instant plus tard. Comme il avait l'air fier, soudain ! Le gringalet, redressé, aurait presque pu impressionner l'un de ses autres matelots. Bah, peut être qu'au fond, il prouverait vraiment sa valeur à bord... Son oeil luisait avec puissance, et son expression moitié victorieuse, moitié reconnaissante faillit lui arracher un sourire. Elle aurait voulu jouer au matelot, soudain, et lui donner, comme autrefois, une tape dans le dos, dont la faiblesse les faisait tous sourire. Mais elle n'avait pas gravi toutes ces marches pour rien ! Distante et fière, elle plissa un coin de lèvres pour lui signifier sa joie -toute relative tant qu'il n'avait rien prouvé- de le voir monter à son bord. Mais alors, il paral, quand un autre serait parti en courant vers al taverne finir sa soirée en beauté, il ouvrit à nouveau la bouche, et un filet de voix aux mots choisis et maîtrisés en sortit. Il n'était tout de même pas ordinaire, ce gars-là...

      - Je n’aurai jamais assez de vous remercier… Mon capitaine. Mais si vous estimez comme moi que l’atmosphère de ce lieu tend à être irrespirable, je vous propose de nous retirer.


    Un instant éberluée, elle contempla ce lieu de nouveau, cherchant et trouvant au final sans grande difficulté ce qu'il pouvait avoir de repoussant quand on enlevait à la crasse et aux ivrognes leur aspect romantique de lieu d'aventures et de liberté. Soit, la rue puait, soit l'air y était rare et la boue souillait leurs pieds.

      - Je dois aller récupérer mes effets à la Jambe de Bois. Si vous n’êtes pas pressée je vous y offrirais bien un verre – à moins que vous ne préfériez directement regagner le Prince.


    Elle faillit sourire à l'idée de se faire offrir un verre à ce miséreux qui cherchait avec exigence malgré sa pauvreté un travail depuis des semaines. Elle aurait pu, en effet, profiter de lui et de sa dernière pièce, en apprendre plus sur lui, et finir, elle aussi, sa soirée en beauté. Mais il lui faudrait alors rendre la pareille, raconter sa glorieuse montée au rang de capitaine. Raconter depuis le début. Elle aurait pu aussi danser un peu, retrouver des amis ou traquer un trésor. Mais avant, elle devrait subir cette conversation privée. La solitude et une nuit de sobriété lui parut un compromis bien appréciable, soudain. Elle lui sourit -fausse reconnaissance éphémère- avant de prendre la parole à son tour.

      - Il me reste du travail sur le Prince, je vais y retourner. Tâchez de rentrer ce soir au navire. Nous levons l'encre à l'aube.


    Ces paroles lancées d'un ton neutre et inexpressif, elle hocha la tête pour le saluer et se détourna de son interlocuteur sans plus de formalités. Les ruelles de Tortuga sont toutes les mêmes. Toutes donnaient l'envie d'être parcourues d'un pas léger, et c'est la tête haute, mais cachée dans l'ombre, légère mais rapide et furtive, que Scarlett s'éloigna sans se retourner. Demain, ils repartaient enfin.
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